Futur disque d'or - Seraphine

Si les concerts à Piltover lui faisaient passer des moments incroyables, Seraphine se demandait qu’est-ce que ce serait à Zaun. Elle appréhendait un peu. Mais la Zalto avait hâte. Il lui manquait quelque chose à Piltover, alors elle espérait que ce vide se comblerait lorsqu’elle chanterait dans la ville d’en bas. Ses parents étaient inquiets. Ils ne comprenaient pas réellement pourquoi leur fille souhaitait se produire dans la ville qu’ils avaient tout fait pour quitter. Mais pour la chanteuse c’était important. Ses journées passées là-bas en compagnie de Galdor et Shilana lui avait fait prendre conscience de tellement de choses. Les Zauniens dégageaient une mélodie que Seraphine souhaitait faire partager à tous.

La jeune célébrité avait une rencontre importante aujourd’hui. Ses amis avaient de bons contacts, et si Seraphine appréhendait de faire la rencontre d’un barron d’en bas, elle était tout autant excitée. Cette femme qu’elle allait rencontrer était celle qui allait possiblement lui permettre de se produire en bas. Seule, Seraphine n’aurait pas pu aller bien loin. A Piltover c’était simple, à Zaun beaucoup moins. Elle ne pouvait pas juste arriver comme ça, et dire « Salut peuple de Zaun, je suis de Piltover et je vais devenir votre star numéro 1 » Dans tous les cas, c’était bien plus complexe que ça en avait l’air.

Seraphine avait rendez-vous avec la Zaunienne devant un café. Elle s’était habillée de façon simple, pour ne pas en faire trop. Cela ne l’empêcha pas de se faire interpeller par plusieurs de ses jeunes fans, ce qui avait le don de la rendre heureuse. Dire qu’il lui avait fallu si peu de temps pour se faire connaitre. « Et voilà pour toi ! J’espère te voir au prochain concert. » La chanteuse fit un clin d’œil à la jeune fille qui dégageait une mélodie si harmonieuse.

La principale intéressée arriva, en parlant d’un retard que Seraphine n’avait même pas remarquée. La fille aux cheveux roses lui adressa un sourire en l’observant. La femme en face d’elle avait un charisme qui ne passait pas inaperçu. « Ne vous excusez pas pour ça voyons. » La voici, elle était enfin là. Celle qui allait apporter un changement dans sa vie.

Elles s’installèrent sur la terrasse d'un café. La baronne voulait lui offrir à boire pour se faire pardonner. Seraphine haussa un sourcil. « Ne gaspillez pas votre argent pour moi s’il vous plait. » La fille aux cheveux roses ne connaissait pas le statut financier de la baronne, mais elle ne souhaitait pas qu’on l’invite. Ce n’était pas nécessaire. « Je suis toute aussi ravie de vous rencontrer Lorelei. Vous ne savez pas à quel point j’avais hâte de ce jour. » Seraphine lui rendit son sourire. « Pourquoi souhaitez-vous m’aider ? Connaissez-vous mes motivations ? » Elle espérait que la baronne ne pense pas que c’était pour la gloire et le succès. Parce que ça allait bien plus que toutes ces choses de célébrité que Seraphine n’appréciait pas forcément.
 

« Vous allez boire tout ça toute seule ? » Séraphine ne jugeait pas Lorelei, mais boire un alcool aussi fort en pleine journée, était-ce raisonnable ? La chanteuse secoua la tête, ça ne la regardait pas. Pourquoi ne pouvait-elle jamais tenir sa langue ? C’était simple. Elle ne pouvait pas s’en empêcher. En attendant, elle n’avait toujours pas dit au serveur ce qu’elle désirait. Alors les yeux de la Pilto se baladèrent sur la carte. Il y’avait tellement de choix. Qu’allait-elle prendre ? Un soft ? De l’alcool pour impressionner la barronne ? Non. Bien sûr que non. Il fallait qu’elle fasse attention à son image, et surtout qu'elle reste elle même. « Je vais vous prendre un cappucino s’il vous plait. » Sa boisson chaude favorite. Seraphine n’insista pas lorsque Lorelei demanda à ce qu’on mette le tout sur sa note. Elle ne voulait pas se battre avec la baronne pour une histoire d’argent. « Merci. » La femme en face d’elle n’attendait sûrement pas de remerciements, mais Seraphine était bien trop polie pour ça.

Le vif du sujet fut vite abordé, et Seraphine revint vite sur Terre lorsque Lorelei répondit à sa question. Elle ne la quitta pas du regard, ce qui rendit nerveuse la chanteuse. D’autant plus que la baronne dégageait une mélodie pleine d’assurance. « Oh. » A quoi s’attendait-elle ? Elle était face à une baronne de Zaun, bon sang. Pas face à quelqu’un qui lui dirait ce qu’elle souhaitait entendre. C’était à se demander si Seraphine ne vivait pas parfois dans un monde fictif, où tout était beau et rose. Elle se reprit rapidement. Le sourire que lui adressait la baronne la rassura néanmoins. Seraphine laissa parler la baronne sans la couper une seule fois. Elle ne voulait pas dire de bêtises alors elle se contentait d’écouter. C'était assez étonnant, car en si peu de temps, Lorelei avait bien cernée la Pilto. « Vous avez vu juste. » Seraphine resserra sa queue de cheval, avant de reprendre, d’un ton plus assuré. « Mon don amplifie ce besoin d’être sur scène, oui. » La jeune femme ne développa pas. Face à Lorelei, les beaux discours étaient inutiles.

La commande arriva, et voulant suivre le mouvement de la baronne, Seraphine se brûla avec sa boisson, qu’elle reposa automatiquement. On pouvait clairement apercevoir la différence entre les deux femmes assises face à face. Deux mondes, deux histoires différentes. C’était presque si Seraphine ne se sentait pas mal à l’aise d’être face à quelqu’un d’aussi fort. « En effet, vous avez besoin de moi, et j’ai besoin de vous. Tout le monde est gagnant à la fin. » Du moins si tout se passait comme prévu. Seraphine avait encore du chemin à faire avant de se faire approuver par les Zauniens. Ou même par Lorelei en personne.

Quand ses amis furent évoqués, Seraphine haussa un sourcil, perplexe. « Que voulez-vous dire ? Vous ne les connaissiez pas personnellement ? » Est-ce que ses amis lui avaient menti sur les relations qu’ils entretenaient avec la baronne ? Ça en avait tout l’air. Une chose était certaine, lorsqu’elle les verrait, elle les sermonnerait d’avoir pris un tel risque. Même si au fond, elle était très touchée.  

Est-ce que la baronne souhaitait donner sa chance à la chanteuse non pas que pour les bénéfices financiers ? Possiblement. Seraphine eut un grand sourire. « Vous ne regretterez pas d’avoir miser sur moi. Je vous le garantis. » Elle se ferait aimer à des Zauniens. Ce ne sera pas facile, mais elle y arriverait. Elle en était convaincu.

Allait-elle boire la bouteille toute seule? A moins que la jeune fille ne lui demande un verre sans le moindre doute. L’alcool même pur l’aidait à supporter l’air de la ville haute. A chaque fois les résultats se faisaient sentir, quelques heures hors de Zaun et le malaise finissait par s’installer. L’alcool aidait toujours à calmer. Rassurez-vous, sans le fiel zaunien l’alcool est pour moi du jus de fruit. Et c’était là tout le problème, la baronne aimait les effets de l’ivresse et, les quantités nécessaires, lorsque la pollution zaunienne ne se mêlaient pas à l'éthanol, la forçait à boire plus que de raison pour une personne normale. Point positif, aujourd’hui n’était pas un jour dédié à l’ivresse mais, au business.

Autre point positif, la chanteuse ne chercha pas à se justifier ou à la corriger. Lorelei aurait pu se tromper, elle se trompait même régulièrement. Une vie passée à exister au travers de la violence zaunienne avait transformé ses idéaux, les avait rendus plus brutaux. Difficile de réussir à envisager que les idéaux de Seraphine, naïfs aux yeux de Lorelei,  puissent avoir un véritable impacte sans que des sacrifices ne soient faits. Sans que le sang coule et que tout le monde paie pour ses péchés, elle n’imaginait pas que Zaun puisse avoir un avenir.

Vous avez tout compris. Je pense que vous pouvez apporter quelque chose à Zaun. Nouveau verre rempli de nouveau et vidé dans la suite. Nouvelle bouffée de tabac, la fumée apaise la sensation désagréable de l’air. Son succès avait toujours été fondé sur une honnêteté directe. Bien que partielle. Aucune raison de changer ses manières ou sa méthode. Votre musique n’est pas mon style. Mais comme je l’ai déjà dit vous êtes douée et certains en bas apprécient déjà ce que vous proposez. Qu’ils puissent accéder à autre chose que la rage typique que l'on peut entendre ne peut qu'être une bonne chose. Sur le papier, l'équation était simple, évidente. Le succès de Glimer Industrie s’était fondé sur le bonheur de ses employés et de leur famille. La force de Glimer Industrie était aussi évidente, il ne s’agissait pas d’une vulgaire entreprise mais d’une tribu. Si Lorelei risquait sa vie sans hésiter pour les siens, elle donnait un exemple, tous étaient prêts à mourir pour la tribu.

Mais la vérité était autre. Pour transformer Zaun elle ne pouvait compter que sur elle-même et les siens. Il y en avait d’autres qui avaient des idées similaires. Mais la plupart d’entre eux étaient bien trop doux. Alors elle faisait ce pourquoi elle était douée, se salir les mains. Si vous rencontrez du succès, je ne doute pas que vous aiderez à rendre Zaun un peu meilleurs. Les gens n’ont pas besoin de survivre, ils ont besoin que leur âme soit nourrie. Ce que la musique fait. La baronne se gardait bien de préciser que, si Seraphine avait du succès, elle aussi bénéficierait du succès en étant celle qui avait amené la chanteuse en bas. Un pas de plus vers le contrôle de Zaun. C'était surtout ce détail qu'elle ne tenait pas à avancer.

Quant à vos amis non, je ne les connaissais pas personnellement. Plus de gens me connaissent que je n’en connais je dois avouer. Mais ils ont frappé à la bonne porte et ils ont agi comme il fallait. Elle ralluma sa pipe qui s’était éteinte, remplissant de nouveau ses poumons de la brume âcre du tabac. Ils ont saisi l’occasion lorsqu'ils l'ont eut. J’aurais fait pareil.” Ils n’étaient pas idiots, la seule baronne de la chimie qui aurait pu leur prêter une véritable oreille sans tenter de trop les manipuler était Lorelei. Non pas qu’elle n'hésiterait pas à se servir d’eux. Mais elle était accessible et ne faisait jamais de mal sans que cela soit nécessaire. Restait à voir ce qu’ils avaient dit à la jeune femme à son sujet.

Mais, d’un point de vue plus pragmatique, voilà ma proposition. Je vous propose dans un premier temps de donner un premier concert sur mon territoire. Nous assurerons votre sécurité pour que vous n’ayez rien à craindre. Si vous rencontrez un succès, aussi vague soit-il nous donnerons d’autres concerts. Les concerts seront gratuits bien évidemment. Je négocierai ensuite avec les autres barons pour que vous puissiez donner des concerts sur leurs territoires. Cependant en dehors de chez moi je doute que les concerts soient gratuits.” Si la chanteuse idéaliste avait du succès elle doutait que les autres barons refusent une opportunité économique. L'attrait du profit était un vice qu’elle imitait à sa manière, mais chez les autres barons… il ne s’agissait pas d’une pantomime. Et elle comptait bien dessus. Si elle offrait des concerts gratuits, les zauniens  l’apprécieraient un peu plus. Elle suggérerait aux barons qui seraient intéressés de rendre les concerts payants, proposant d’assurer la sécurité de la chanteuse à chaque fois. Et, si ses hommes n’assuraient pas la sécurité de la jeune femme et qu’un accident devait avoir lieu… Ce serait dommage mais, Lorelei saisirait l’occasion. Seraphine était son investissement.

Qu’en dites vous pour un début?

Si la jeune femme espérait vraiment pouvoir réconcilier Zaun et Piltover, la baronne exploiterai ce rêve.

De l’alcool fort, un jus de fruit ? Il fallait croire que tout le monde ne tenait pas cette boisson de la même façon. Lorsque Seraphine buvait, et c’était rare, si elle osait entamer un troisième verre, son foie le lui faisait comprendre. Rien que cette pensée l’écœura, et elle ne répondit rien de plus à la baronne.

Ses yeux eurent des étoiles dans les yeux lorsque Lorelei lui avoua qu’elle pourrait apporter quelque chose à la ville d’en bas. C’était son but premier, et elle espérait être à la hauteur. C’était important pour Seraphine, que les zauniens ne soient plus mit à l’écart. Du moins, elle, elle ne les laisserait pas à l’écart. Ils étaient tout aussi importants que les piltos à ses yeux. Seraphine serra ses doigts contre sa tasse qu’elle porta à nouveau à ses lèvres. « Je veux réellement que les Zauniens puissent s’exprimer à travers ma musique vous savez. » Il fallait que quelqu’un soit cet écho, et Seraphine était prête à être cet écho.

Le genre de musiques que faisait la chanteuse n’était pas le style de la baronne. Oh ? Alors elle écoutait quand même de la musique. Seraphine sourit. « Qu’est-ce que vous aimer ? Comme style de musique ? » C’était un peu hors contexte, mais la curiosité de la pilto était incontrôlable. Elle doute que la baronne ne lui réponde, mais elle essaya tout de même.

Seraphine eut un grand sourire qui dessina ses lèvres lorsqu’elle sut que sa musique avait traversé jusqu’en bas. Peut-être que ses débuts ne seraient pas aussi compliqués qu’elle le pensait ? « Je suis d’accord. » Elle inspira, essayant de ne pas avoir l’air trop prétentieuse. « Le temps de quelques chansons, j’espère pouvoir faire oublier à Zaun leurs souffrances. » C’était un défi qu’elle se donnait à elle-même.

« Je suis ravie qu’une baronne tel que vous fasse tant confiance à la musique. Ça me rassure, et ça me donne d’autant plus confiance dans ce que je cherche à accomplir. » Tant de ses amis Pilto trouvait son idée stupide et inconsciente. Mais Seraphine était têtue, et elle croyait en ses rêves. Ce que la baronne semblait étonnamment comprendre.

La fille aux cheveux roses eut un sourire. Ses amis lui avaient ouvert une porte qu’elle n’aurait jamais pu trouver seule. « J’en ai bien l’impression. » Elle l’entendait, Lorelei était sincère dans ses mots. Dire que tant de piltos traite les barons comme des monstres sans cœur, cela eut le don d’agacer Seraphine. Il y’avait tant de stéréotypes faussement fondés sur la ville d’en bas. C’était dommage. Mais ces stéréotypes, Seraphine les ferait disparaitre. C’était peut-être naïf, mais tant pis.

La suggestion pour un début digne de ce nom arriva. Seraphine écouta attentivement la proposition de Lorelei. « Cela me semble une bonne idée de commencement. Vous avez ma confiance Lorelei. » En ce qui concerne le fait que ses concerts soient gratuits ou payants, cela importait peu à la chanteuse. « Concernant les autres barons, je m’adapterais à leurs préférences. Que ce soit pour le prix ou autre. » Seraphine n’était pas compliquée, tant qu’on ne lui demandait pas l’impossible et des choses qui allait à l’encontre de ses principes. « Si ce projet, fonctionne, je ferais une chanson en votre honneur Lorelei. » C’était dit avec un petit rire, bien qu’elle ne plaisantait pas vraiment.

Difficile de ne pas croire à l’honetteté de la jeune femme. Si elle avait un don pour mentir celui ci était spectaculaire. Mais difficile à croire de par les antécédents de la jeune fille. Son honnêteté en était presque désarmante et, si Lorelei n’avait pas eu suffisamment d'expérience, elle aurait eu du mal à résister à la tentation de simplement soutenir la chanteuse. Mais en traçant son chemin à coup de violence et de manipulation pour arriver au sommet de Zaun… Elle ne pouvait pas se permettre de se laisser aller. Que les rêveurs innocents luttent à leur manière. Elle, avait ses propres méthodes.

Permettre aux zauniens de s’exprimer? Je vous conseil de faire attention à vos désirs, certains peuvent être dangereux lorsqu’ils prennent vie. La baronne avait une conscience aiguë du prix qu’il fallait payer pour arriver à ses fins parfois. De la détermination exigée. Dans le meilleurs des cas, si elle parvenait à nettoyer Zaun elle était condamné. Condamnée à mourir dans la démence si la ville finissait par être purifiée. Et il s’agissait là de la meilleure fin possible, elle ne prenait pas en compte les sacrifices qui seraient faits dans cette réflexion immédiate. Elle eut un sourire presque compatissant. Pour l’instant il ne s’agit que d’un rêve, un rêve pour lequel je suis prête à vous aider. Mais si vous y parvenez il pourrait y avoir de dangereuses répercussions.

Le conseil de Piltover et les clans n'apprécieraient pas que les zauniens puissent s’exprimer. Avant même que la chanteuse ne parvienne à unir émotionnellement piltis et zaunien, si elle parvenait à donner une voix aux zauniens… Elle serait en danger. Les autres barons seraient une menace sans le moindre doute à l’instant où elle permettrai au peuple de se faire entendre. Elle deviendrait une menace pour leur emprise sur sa cité bien aimée. A moins qu’elle ne prenne le contrôle du conseil de Zaun avant. Mais le plus gros danger viendrait de Piltover. Sous ses airs de beauté et de pureté, la ville était retorse. Des décennies à soumettre les zaunien par la violence et, même aujourd’hui cela ne s’était pas arrêté. Certains de ses “collègues” étaient tombés non pas sous les coups de zaunien mais, de piltis après tout.

Quand à ce que j’aime… attendez un instant. Lorelei vivait uniquement selon ses principes. Patiente mais pas prudente pour autant, elle était guidée par ses émotions. Se saisissant d’une pièce, elle jeta celle-ci en l’air. Face elle soutenait jusqu’au bout la chanteuse. Pile elle l’exploitait jusqu’à la jeter une fois devenue inutile. Tournoyant, probablement sous l’incompréhension de son interlocutrice, la pièce joue l’avenir des deux femmes. Et lorsque la baronne la réceptionne un sourire amusé se dessine sur son visage, la pièce disparaissant dans une de ses manches. La musique que j’apprécie est purement zaunienne, tout ce qui est issu de Zaun, qui hurle sa rage, murmure la mélancolie ou encore raconte le désespoir… J’aime ce chaos d’émotions. Encore un nouveau verre rempli, encore une fois vidé dans l’instant. Nouvelle et profonde inspiration sur sa pipe. Dommage qu’elle n’ai pas pris un mélange avec du shimmer mais, à Noxus fait comme les noxiens.

C’est pour cela que je vous conseil de prendre garde. Zaun est une ville sans concession pour les émotions. Mais je ne devrais pas m’inquiéter, vous avez une idée du vrai visage de cette ville après tout n’est-ce pas? Inutile de préciser qu’elle savait que Seraphine était déjà descendue dans Zaun accompagnée de fils et filles de la ville. J’apprécierai cependant si vous pouviez éviter de faire oublier aux zauniens leur souffrance. La souffrance fait partie de notre vie et, l’oublier nous condamnerait à répéter nos erreurs passées.

Par contre, il allait être capitale d’apprendre à la jeune fille un minimum de prudence. Elle ne devait pas faire entièrement confiance aussi bien à la baronne de la chimie qu’aux autres barons. Pour son propre bien. Même si Lorelei comptait s’occuper elle-même des échanges avec les autres barons. Afin de s’assurer que la jeune femme ne puisse être utilisée par aucuns autres qu’elle. Je vous déconseille cependant de me faire pleinement confiance, je ne suis pas arrivé là où j'en suis en étant une bonne personne. Je me considère comme étant la membre du conseil des barons la moins… malveillante mais, en bas, la population me perçoit comme une personne sans pitié. Ce qui est loin d’être un euphémisme. Elle était sur ce point parfaitement honnête car, contrairement à la plupart de ses collègues elle n’avait qu’un seul objectif, assurer à Zaun le meilleur avenir possible. Toutes ses actions était dédié à cette idée. Je ne tournerais jamais mon dos aux autres barons et, nous dirigeons Zaun de concert pourtant. Tout du moins pour l’instant.

Elle ne plus réprimer un éclat de rire sonore lorsque Seraphine parla avec humour de potentiellement faire une chanson en son honneur. Evitez s’il vous plait. A moins que vous ne vouliez chanter quelque chose de brutal.” Lorelei avait encore du mal à réprimer quelques éclats amusés à l’idée qu'elle, pouvait finir par avoir une chanson lui étant dédié. Même si l’idée était tentante, que l’histoire retienne une version idéalisée de celle qu’elle était… Non, elle préférait largement que l’histoire finisse par l’oublier.

Mais parlez moi un peu de vous. Pas les conneries que les journalistes aiment raconter mais, ce que vous, vous voulez raconter. Pas de question de ma part, juste ce que vous avez envie de raconter. En échange je répondrais aux questions que vous pouvez vous poser à mon égard.

Si les deux devaient travailler ensemble, il allait falloir apprendre à se connaître.

Les émotions négatives des Zauniens ne lui faisait pas peur à Seraphine. Elle haussa les épaules, en fixant la baronne de ses yeux bleus. « Je saurais trouver les bonnes paroles. Ne vous en faites pas. » Elle fit un clin d’œil à Lorelei, sûre d’elle et de ce qu’elle avait pour projet d’accomplir. La souffrance de Zaun, c’était la source d’inspiration qu’elle recherchait. Et peu importe où ça la mènerait, elle en assumerait les conséquences. « A quel genre de répercussion pensez-vous ? Vous savez, je veux que les choses évoluent entre nos deux villes, mais je doute que ma musique fasse un effet révolutionnaire. » Et si c’était le cas, elle doute que le conseil de Piltover la laisse se produire à nouveau en bas. Ou même en haut. Seraphine secoua la tête, les scénarios négatives ne devaient pas être envisagés.

La chanteuse eut un sourire lorsque la baronne n’ignora pas sa question. Mais Lorelei s’amusait avec une pièce sans dire le moindre mot. Seraphine haussa un sourcil, sans comprendre. Était-ce un moyen de prendre une décision ? Possiblement. Elle se demandait ce que les deux faces pouvaient avoir comme réponse. Et quelle était la question. La Pilto retint sa curiosité puisque Lorelei lui répondit. La baronne aimait les musiques pleines de rage et d’hurlement qui parlaient de chaos et de désespoir. « Intéressant. Vous m’emmèneriez écouter l’une de ces musiques ? » Peut être que Seraphine pourrait adapter son style aux Zauniens ? C’était une question qu’elle étudierait.

Seraphine hocha la tête. « Je commence à bien connaître Zaun en effet. Et toutes ces émotions sont tellement plus inspirantes que celles des Piltos. » Il n’y a rien de mieux que de la souffrance pour qu’un artiste créé la plus belles de ses œuvres. Seraphine prit note de ce que lui demanda Lorelei. « Oui, excusez-moi. » Elle avait raison la baronne. Pas besoin d’enlever la souffrance des zauniens pour qu’ils passent un bon moment. « Dans tous les cas, j’espère qu’ils se sentiront libérés en m’écoutant. » Tout garder en soi n’est jamais bon. Mais écouter quelqu’un le faire à sa place, c’est toujours mieux que rien.

En ce qui concerne Lorelei, celle-ci fit comprendre à Seraphine qu’elle ne devait pas lui faire confiance comme ça. « Et donc ? » Oui, la chanteuse était trop imprudente. « Ça ne me regarde pas vos histoires d’en bas. Que vous soyez bonne ou mauvaise, l’important c’est que vous m’aidez. »  Si elle voulait faire confiance à Lorelei, et bien elle le ferait. Peu importe son statut et ses actions. « Dans tous les cas, si vous me faites un coup bas, ça me fera une belle chanson sur la trahison. » Elle rit après ça. Clairement, Seraphine était dans un monde à part.

Chanter quelque chose de brutal. Ce n’était pas du style de la chanteuse, mais elle pouvait trouver une solution. « Rien n’est impossible pour Seraphine, la chanteuse rêveuse. » Elle eut un sourire attendrissant, mais Seraphine n’insista pas. Elle ne voulait pas harceler Lorelei non plus.

Lui parler d’elle ? Mais que pouvait bien raconter Seraphine à Lorelei qui soit un peu plus orignal que ce qu’elle a l’habitude de raconter aux journalistes de Piltos ? Elle réfléchit un instant, mais une mélodie pleine de mépris vint s’emparer de ses oreilles. Elle fronça les sourcils en se bouchant les oreilles. Ses yeux regardèrent maintenant un noble Pilvo assis à la table juste à côté d’elles. Seraphine se leva, renversant sa tasse au passage. « Vous savez cette femme va me faire accomplir mon rêve ! Alors je vous demanderais de garder votre mépris pour vous ! » En soit il l’avait gardé pour lui. L'homme en question lui fit un regard mauvais, sans rien répondre pour autant.

Son don, bien que Seraphine l’ait plus ou moins dompté, il arrivait que parfois elle n’arrive pas à contrôler ses émotions et celles des autres en même temps. Surtout lorsque les mélodies négatives lui était adressée personnellement. Elle se rassit, gênée d’avoir fait une scène comme celle-ci devant la baronne. « Mon don n’est pas toujours facile à gérer. » Ce n'était pas quelque chose qu’elle dirait à un journaliste ça. « Mais je travaille dessus. » Il le fallait. Parce que sinon, comment allait-elle gérer la foule de Zaun ?

Seraphine fit signe au serveur et s’excusa d’avoir casser la tasse. Le jeune homme haussa les épaules avant de dire que ce n’était pas grave. Ces mots gênèrent d’autant plus la chanteuse puisque la mélodie que dégageait le serveur disait le contraire. « Pouvez vous me montrer un endroit que vous appréciez Lorelei ? Je ne me sens pas à l’aise ici, et j’entends que vous non plus. »

La baronne prit le temps d’écouter ce que Seraphine avait à dire, ne cherchant pas à s’attarder sur ce qu’elle pouvait dire et, lui laissant le temps de poser ses questions. Sa détermination, tout du moins celle manifestée, était admirable.  Sa vision n’était pas binaire, sa lecture du monde ne se divisait pas directement entre les bonnes et mauvaises personnes. Restait à voir ce que cela pouvait donner en pratique. Mais si Lorelei ne s’était pas trompé, il n’y avait aucune raison de s’inquiéter. La jeune femme en avait besoin. Elle même ne pouvait qu’être d’accord, Zaun était bien plus inspirante que Piltover. L’architecture de Piltover, sa structure, son exploitation de la technologie… Tout était organisé, esthétique, beau et propre. Quelle vie pouvait-on avoir dans un tel lieu? Comment pouvait-on désirer y vivre?

Difficile de ne pas repenser à Marko. Cette raclure avait trop voulu se rapprocher de Piltover personnellement, cherchant marriage avec une héritière… Il était mort. Comment? Elle n’en avait aucune idée, elle s’était contentée d’être une des première à se nourrir sur le cadavre de sa richesse. Pourquoi avait-il tenté de “s’élever” de cette manière? C’était méprisable et stupide. Que pouvait-il bien rechercher à Piltover? La paix? La sécurité? La tranquillité? Le pouvoir? Même s’il y était parvenu il aurait perdu de son tranchant, aurait rouillé… et perdu tout ce qu’il avait pu construire à Zaun. Pourquoi se condamner à un tel simulacre de pouvoir? Qu’aurait-il bien pu en faire?

Mais il était mort, et l’initiative ne venait clairement pas de Zaun. Point positif, les barons avaient vaguement compris que leur place n’était pas à Piltover mais à Zaun. On ne mélangeait pas l’eau et l’huile mais, le sang et l’eau. Zaun ne serait véritablement reconnu par Piltover le jour ou, la ville ne serait plus traitée comme une ancienne colonie. Et pour ça, il serait nécessaire d’unir Zaun en une seule tribut, transformer le système. Opposition d’idées et d’idéal, de système et de mécanique. Que Zaun puisse tenir tête à Piltover sans aucune difficultée. Mais cela passait aussi par une reconnaissance des autres. Et alors, alors seulement il serait question de payer les dettes.

Je vous accorde sans le moindre doute que vous avez au moins du cran pour vouloir agir comme ça. Soudain la jeune femme fut pris d’un éclat, renversant la table. A peine le temps d’attraper la bouteille et le verre avant qu’il ne tombent. Aussi peut imposante que la chanteuse était, lorsqu’elle incendia un pilti, Lorelei ne put que reconnaître la force de conviction dans sa voix. Elle avait plus de présence, guidée par ses émotions. Difficile de ne pas sourire en l’écoutant. Puis aussi subitement, elle s’excusa, expliquant qu’elle pouvait avoir du mal à maîtriser son don. Pas de problème, nous avons toute notre vie pour nous améliorer. Et sans attendre, toujours imperturbable malgré la scène qui venait d’avoir lieu, elle se leva, laissant son verre qui se brisa au sol. Acte clairement mesquin à l’égard du serveur, Lorelei ayant toujours sa pipe en main tandis que l’autre tenait la bouteille. Ce genre d’accident ne le dérangeait pas après tout non? “Mais suivez-moi si vous voulez que je vous montre un endroit que j’apprécie.”

Elle se mit en marche, bouteille à la main, encore une fois sans se soucier de ce que quiconque pouvait avoir à dire. Voyant que Seraphine la suivait, elle se dirigeait sans hésiter dans une direction précise. Pendant quelques minutes la baronne ne se montra pas des plus loquaces, plus concentrée pour retrouver son chemin vers un lieu précis du quartier Nord. Voilà! Devant les deux femmes, une petite place dont le seul véritable point d’intéret était sa proximité avec la falaise de Piltover et, le convoyeur hexdraulique qui permettait de descendre dans les entrailles de Zaun. S’avançant sans hésiter elle dépassa le convoyeur et, au détour des batisse, une vue inhabituelle se dévoile. Pour seul séparation entre le vide et la place, une simple barrière de fer forgé. Sans cet obstacle un pas aurait suffit pour que la chute soit longue et l'atterrissage brutal. Mais le plus impressionnant était le panorama qui s’offrait. On pouvait voir dans la distance les portes du soleil. En baissant un peu les yeux, la Promenade, véritable frontière entre Piltover et Zaun, lieu de mélange.

Elle bu une gorgée à la bouteille qu’elle avait gardé, ayant rangé sa pipe le long du chemin. Cet endroit et un des rares que j’apprécie à Piltover. Je ne vous surprendrais pas en disant que je n’aime pas cette ville, Piltover est bien trop tranquille à mon gout. Mais c’est sans importance, car en bas, il y a Zaun. Elle désigna les brumes chimique qui, tout en bas dissimulaient les bas fonds de sa ville. C’est à peu près tout en bas de là ou nous nous trouvons que je suis née. Ou plutôt, c’était à cet endroit que Zaun l’avait adoptée, qu’elle en était devenu la fille. Quand j’étais gamine, les jours de beau temps nous pouvions voir les portes du soleil avec mon frère… La vue était impressionnante, je m’imaginais être une princesse noxienne en voyage à Piltover parfois. Il n’était pas difficile d’entendre la nostalgie dans sa voix alors qu’elle s’exprimait. Mais, c’était juste des histoires de gosse, pas même des rêves. Car mon rêve est en bas et l’a toujours été. Ce n’est pas juste mon esprit qui ne désir pas vivre à Piltover mais, mon sang. Car, le sang de Zaun coule dans mes veines, c’est cette ville qui me fait vivre.

Elle prit une longue pause, contemplant sereinement et fièrement cette ville qui lui était chère, sa ville. Quand vous me demandiez à quel genre de répercussion je pensais. Quand vous m’avez dit que vous doutiez que votre musique… C’est que vous ne voyez pas le tableau à plus grande échelle, ce qui est normal. Alors, est-ce que votre musique peut faire changer les choses? Sans le moindre doute. Mais seule? Sûrement pas.  Votre voix fait partie d’un tout. Comme moi. Comme chaque âme de Piltover et de Zaun. De la plus heureuse à la plus désespérée. Certaines ont plus facilement de poids. Certaines âmes peuvent avoir plus d’importance. Certaines à l’inverse, méprisées et ignorées, peuvent s’unir, défier les puissants de cette manière. Votre voix n’est pas seule, il y a de multiples acteurs. Et tous ces acteurs ont des objectifs, certains proches des vôtres, d’autres s’y opposant. Et je fais partie de ses acteurs, comme tous ceux de ma tribu. Et si je pense comme tous les miens que Piltover a encore une lourde dette à payer à Zaun.. Ce n’est pas aux gens de payer cette dette. C’est au système de payer cette dette, au système et à ses acteurs. Mais pour cela le système doit changer, et celui-ci ne peut être changé que par les gens. Nos deux villes sont encore bloquées dans un système déjà trop vieux depuis plus de vingt ans.

Lorsque Zaun était devenue une cité libre, dernier moyen pour Piltover de mettre fin aux émeutes qui manquaient de ravager les deux villes. Les Glimer ne s’étaient jamais joins aux émeutes, méprisant déjà toute forme de règle que la cité du progrès avait pu tenter d’imposer. Alors, lorsque le chaos s’était abattu dans les rues de Zaun, eux étaient déjà prèts. Et ils avaient saisi l’opportunité là où elle était. A l’image des amis de Seraphine avec la baronne. Certains des acteurs de ce système feront tout pour le maintenir. D’autres acteurs encore, agissent pour le détruire. Ce que vous exprimerez fera de vous un acteur, vous interagirez aussi avec ce système. C’est de cette manière que vous permettrez au système de changer. Vous n’êtes pas la seule. A Zaun certains  iront dans votre sens. D’autres, pas particulièrement mais pour autant vous aurez la chance de pouvoir agir ensembles, de concert. De cette manière, vous vous nourrirez de ce qu’ils peuvent exprimer; de la même manière, vous les nourrirez de ce que vous pouvez exprimer. Et il y en aura d'autres à l’inverse qui s’y opposeront, qui vous mettront en danger. Et il en est de même pour Piltover.

Nouvelle pause, cette fois doublé d’une longue lampée d’alcool, la bouteille diminuant terriblement se fit-elle la remarque. Il ne s’agit pas juste de vous mais, de nous tous. Et certains acteurs du système peuvent s’avérer particulièrement dangereux. De la même que certains opposants. Si Piltover et Zaun sont deux cités qui en apparence changent sans cesse, leurs fondations elles, ont bien du mal à évoluer. Mais, je sais qu’à Piltover, certains, autres que vous, sont déterminés à essayer de changer les choses, à chercher un avenir meilleurs. Et je sais qu’à Zaun je vais tout changer.

Accoudée à la barrière, elle contemplait les brumes de Zaun, sa voix calme mais déterminée. Elle n’était pas comme le petit sauveur de Zaun. Lui était un gosse idéaliste, esclave de ses idéaux. De la même manière qu’elle ne pouvait être comparée à la shérif de Piltover. Prise au piège par des règles qui limitaient ses actions. Contrairement à eux, elle ne courrait pas simplement après un rêve. Elle savait comment elle donnerait naissance à son rêve et déjà lui donnait forme. Elle savait quoi faire et le faisait sans hésiter.

Du cran. Si Seraphine n’en avait pas eu, elle n’aurait pas été très loin. Ce cran, il lui ouvrait des opportunités qu’elle n’aurait jamais pu avoir si elle était restée cachée dans son coin. Et peut être qu’un jour, il la mettrait en danger. Mais si c’était le prix à payer pour pouvoir arriver au bout de ses rêves, elle ne reculerait devant rien. Alors elle garda son sourire lorsque la baronne lui fit la remarque. Peut-être n’était-ce pas un compliment, mais Seraphine le voyait ainsi.

La scène passa, et Lorelei ne réagit pas plus que ça. Heureusement. Énerver la Zaunienne était la dernière chose qu’elle souhaitait. Si elle changeait d’avis subitement à cause d’une action stupide, Seraphine s’en voudrait terriblement. Et si la chanteuse voulait poser une autre question à Lorelei, elle se retint. Elle la poserait certainement plus tard. Lorsqu’elles seraient parties de cette terrasse, à l’abri des mélodies méprisantes des piltos.

La baronne accepta la proposition de la chanteuse, et voilà que Seraphine la suivait. Dans un autre contexte, cela aurait pu être dangereux. Qui suivrait aveuglement une baronne de Zaun sans imaginer le pire scénario ? Seraphine semblait être cette personne. Même si on pouvait la penser naïve, son pouvoir était bénéfique pour ce genre de situation. Si elle avait entendu ne serait-ce, que le moindre son malsain, elle aurait pris la fuite de suite. Mais ce n’était pas le cas, alors elle suivait Lorelei, dans le silence le plus total.

Une fois qu’elles furent arrivées, les yeux bleus de Seraphine se mirent à briller, ébloui par la vue magnifique que lui offrait Lorelei. Elle avait bien fait de lui proposer de choisir l’endroit puisque c’était un paysage à couper le souffle. La Pilto s’approcha un peu plus, posant ses mains sur la barrière qui la séparait du vide. Les mots de Lorelei rendaient ce moment encore plus beau. « C’est magnifique, cette vue sur nos deux villes. » Et si la baronne n’aimait pas Piltover à cause de son calme, elle appréciait ce qu’offrait le panorama. Seraphine tourna sa tête pour observer les yeux de la baronne. « C’est étrange. Tout le monde rêve de paix, mais j’ai l’impression que ce n’est pas votre cas. » Elle était si différente, Lorelei. Etait-ce à cause de sa vie à Zaun et de toutes les responsabilités qui reposait sur ses épaules ? Dans tous les cas, la baronne intriguait la chanteuse.

Lorelei se confia, sur l’endroit où elle était née, avec une anecdote de son frère et elle plus jeunes. Seraphine eut un regard des plus tendre en écoutant l’autre femme. Elle aimait lorsque les personnes parlaient d’elles, et de leur passé lointain ou non. Cette dévotion pour Zaun. Seraphine pouvait presque la ressentir tellement il sonnait fort chez Lorelei. « J’aime votre dévotion. » La pilto vint se mettre à côté de la zaunienne. « Mon sang est semblable au votre vous savez. C’est peut-être pour cela que je tiens énormément à Zaun. » Etait-ce égoïste ? Seraphine aimait-elle Zaun seulement à cause de ses origines ? Non. Elle savait au plus profond d’elle-même que ça allait bien plus loin qu’une histoire d’origine.

Une question restée en suspens trouva finalement sa réponse. Les oreilles de Seraphine étaient des plus attentives tandis que Lorelei expliquait son point de vue sur les répercussions dont elle avait fait allusion plus tôt. C’était si profond. Ce discours. Et pourtant si réaliste. Seraphine laissa parler Lorelei, sans la couper une fois. La baronne venait de lui apporter tant de réponses à tant de questions. Toutes ces mélodies, c’est ce qui rendait Seraphine idéaliste. Elle n’était jamais seule, comme le disait si bien la baronne.


« Je comprends mieux les enjeux maintenant. » C’était devenu une conversation des plus sérieuses. « Je ne suis pas une politicienne ni même une meneuse, pourtant j’espère être en mesure d’apporter quelques choses avec mes concerts dans nos deux villes. » Seraphine eut un sourire lorsque Lorelei évoqua vouloir changer Zaun. « Qu’est-ce que vous souhaitez améliorer à Zaun ? »

La paix? Tout le monde désirait-il vraiment la paix? Tout le monde rêvait-il vraiment de la paix? Même en retirant les individus qui n’étaient qu’en quête de chaos et de conflit… Elle n’y croyait pas. Lorelei n’avait rien contre la paix mais… vraiment? Si elle pouvait croire que la jeune femme y aspirait, elle était une exception. Dans la bouche de la plupart, la paix était juste une excuse, un mot pour justifier ses actions. Tous ces idéalistes, appliquant la violence sur ceux qu’ils considéraient comme un danger… Lorsque ceux ci parlaient de paix elle ne pouvait qu’entendre des mensonges. Y avait-il quoi que ce soit qui justifiait la violence en dehors de la nécessité de la survie? A l’instant ou l’on choisissait la solution de la violence, tout discours de paix devenait un mensonge, une illusion. Au nom de la paix, tout pouvait être permis. Elle ne put s'empêcher de sourire, avec ironie, soutenant paisiblement le regard de Seraphine. C’est vrai, je ne cherche pas la paix. Qu’est-ce que la paix aurait à m’apporter en comparaison de la liberté? De ma liberté mais, aussi de la liberté de ma tribu. Beaucoup se servent de la paix comme d’une justification. Mais la liberté elle… Nouvelle rasade d’alcool. La vraie liberté ne justifie rien, elle exige. Elle fait de nous des individus solitaires. Et, c’est à cet instant que la paix devient une illusion, lorsque ceux qui aspirent à la liberté s’unissent, défient les règles imposées.

Mais, étaient-elles similaires? Leur sang était-il vraiment semblable? Elle comprenait ce que voulait dire. Et elle faisait erreur, une erreur inévitable. Après tout, difficile de faire plus zaunienne que Lorelei, dans ses veines coulait le même poison qui tuait les zauniens, elle était physiquement liée à cette ville, ne pouvait survivre sans sa pollution. Raison de plus pour vouloir purifier la ville. Mais qu’en aurait-il été si, comme elle, Seraphine avait vraiment vécu en grandissant à Zaun? Que se serait-il passé si, par exemple, elle avait été une orpheline que la baronne aurait pris sous son aile? La réponse était évidente, elles auraient été similaires. Si Lorelei était liée physiquement à la cité, Seraphine aurait eu un lien autre. Son cœur aurait appartenu à Zaun bien plus qu’elle ne pouvait l’imaginer.

Léger rire. C’était une bonne chose que Seraphine n’ai pas eu cette vie. Elle était bien trop douce pour mériter de s’engager sur une voie comme celle de la baronne. Car elle était loin d’en avoir fini avec les morts. Non pas que prendre des vies lui posait problème. Mais Lorelei en était capable, sans la moindre hésitation. Elle ne reculerai devant aucun sacrifice, ne se justifierai jamais. Elle avait fait son choix, quel chemin arpenter. Un chemin qui n’était pas adapté à tous. Et elle parcourait cette voie sans remords, sans douter le moins du monde. La dévotion dont elle faisait preuve à sa ville, sa manière d'agir… agissait-elle de la bonne manière? Elle ne le savait pas et ne s’en préoccupait pas.

Peut-être que d’autres après pourraient amener à Zaun la paix, mais ce n’était pas son objectif. Mais, des personnes comme la chanteuse pourraient peut-être le permettre. Bien qu’elle doutait que Zaun ne soit un jour vraiment paisible. Non, Zaun était un lieu débordant de vie et de passion. Les zauniens n’étaient pas paisibles, ils étaient fous. Pas besoin d’être un meneur ou quoi que ce soit. On ne naît pas en tant que meneur, on le devient. La moi d’il y a vingt-deux ans aurait bien ri si on lui avait annoncé qu’elle aurait sa place au conseil de Zaun. Encore plus si on lui avait dit qu’elle chercherait à unir Zaun. Ses derniers mots avaient été exprimés avec humour mais, étaient une vérité. Elle prendrait le contrôle de Zaun. Seraphine elle-même était un moyen d’y parvenir. Un moyen qu’elle n’aurait pas envisagé. De la même manière qu’elle n’aurait jamais envisagé devenir baronne de la chimie par le passé. Mais les occasions devaient être saisies là où elles étaient.

Ce que je souhaite améliorer à Zaun? Elle était naturellement violente, elle le savait. Une tension constante entre ses pulsions et le contrôle qu’elle exerçait sur elle-même. Alors, pourquoi cherchait-elle à faire de Zaun un lieu meilleur? Alors qu’en laissant la ville dans son état actuel elle pourrait vivre pleinement et avec satisfaction. Tellement de choses. La baronne poussa un profond soupir, non pas de lassitude mais, presque d’impatience. Le règne des barons de la chimie doit prendre fin, il condamne Zaun à n’être qu’un miroir distordu de Piltover. Puis il y a aussi la pollution, elle condamne les enfants de Zaun à mourir dans la souffrance s’ils ne parviennent pas à s’extirper de cette ville. Ou il y a encore le rapport que Zaun entretient avec Piltover. Zaun doit pouvoir tenir tête à Piltover si elle veut exister pleinement, elle ne doit pas dépendre de la cité du progrès. Cette ville doit s’unir, que toutes les anomalies, toutes les étrangetés de Zaun existent ensembles, se nourrissent les unes des autres. La différence doit être la nature même de l’union.

Elle resta pensive un instant. Elle en disait bien plus à la jeune femme qu’elle n’en disait à la majorité des gens qu’elle connaissait. Et, si l’atmosphère que dégageait Seraphine n’y était pas pour rien… Lorelei était bien trop prudente pour simplement se laisser aller à parler ouvertement. Mais, en agissant ainsi, elle nourrissait les pensées de la chanteuse. En s’exprimant ouvertement, la baronne laissait déjà une empreinte. Inutile de préciser que, lorsqu’elle serait parvenue à ses fins, il serait nécessaire qu’elle aussi disparaisse. La baronne de la chimie, dirigeante de Glimer Industrie était un pur produit de la Zaun qu’elle voulait transformer. Pour l’avenir de sa ville, il serait nécessaire qu’elle disparaisse, que d’autres prennent sa suite.

Tout le monde avait sa propre définition de la paix. La baronne comme la chanteuse n’avaient apparemment pas la même définition de ce mot. Mais c’était intéressant d’entendre le point de vue de Lorelei. « Et lorsque vous obtiendrez cette liberté, que ferez-vous ? » Seraphine n’avait pas posé la question sous forme de possibilité, car elle était optimiste concernant ce rêve de liberté que souhaitait la Zaunienne. « Sinon vous aimez faire d’autres choses en plus de la politique de Zaun ? » Elle avait bien des passions ou des passes temps pour se détendre la baronne, non ? Comme Seraphine aimait la musique indépendamment des concerts, et passer du temps avec ses proches. Elle se demandait bien ce que pouvait faire la baronne pour se détendre. Vu la bouteille qu’elle descendait, peut être aimait-elle faire la fête ?

Là n’était pas le sujet. Elles parlaient de choses bien plus sérieuses. Comme de la Lorelei version miniature. « La-vous d’il y’a 22 ans ? Mais vous avez quel âge au juste ? » Oui bon, Seraphine se concentrait sur ce qui n’était pas important. Il fallait qu’elle fasse un effort, si elle voulait changer quelque chose dans la société de Piltover et Zaun. « Comme quoi quand on veut quelque chose, on peut y arriver si on persévère. » Elle félicitait la baronne et se donnait un conseil en même temps. « Lorsque vous étiez plus jeune, vos projets de vie étaient différents ? » Peut être que dans quelques années, Seraphine changerait de rêve ? Peut-être oui.

La question sur les améliorations à faire à Zaun fut posée. C’était inspirant, comme réponse. Bien que la Pilto soit descendu plusieurs fois dans la ville d’en bas, elle ignorait encore plein de choses à son sujet. La mélodie que dégageait Lorelei à ce moment précis, elle était semblable à beaucoup de Zaunien que Seraphine avait entendu en descendant. « Vous allez avoir beaucoup de travail, mais j’espère que vous réussirez. » C’était sincère. Seraphine aussi voulait que Zaun s’élève, et qu’elle ne soit plus dans l’ombre de Piltover. « Vous dites vouloir mettre fin au règne des barons, mais vous en êtes vous-même une. Alors je ne saisis pas trop. » C’était contradictoire non ?

Que ferait-elle lorsqu’elle obtiendrait cette liberté dont elle parlait? Léger sourire, elle avait déjà obtenu la liberté dont elle parlait. Nul autre qu’elle ne pouvait lui dicter sa conduite, elle agissait uniquement selon ses principes et ne laissait personne contrôler sa vie. Alors, oui, elle devait composer avec certaines limites, faire preuve de discrétion quant à certains de ses objectifs… Mais uniquement car elle avait choisi de respecter certaines règles, pour mieux redistribuer les cartes. Elle avait toujours été libre, depuis son enfance, agissant comme bon lui semblait. Enfant rêveuse, adolescente turbulente, adulte déterminée, baronne implacable. Et si elle se limitait, elle le faisait uniquement dans le but d’accomplir un objectif précis. Être libre impliquait aussi de savoir où fixer ses limites, quand les briser. “Je suis déjà libre, je l’ai toujours été.” Détachée de ses premiers souvenirs, d’un passé qui aurait sans le moindre doute tenté de l’enfermer dans un carcan.

L’esprit de la chanteuse avait de quoi être surprenant, elle semblait bondir d’une idée à une autre, sans cesse, comme un rat sous shimmer. A chaque instant elle semblait avoir une idée, une interrogation, s’exprimait directement. Elle ne semblait pas s’inquiéter de ce que la baronne pouvait penser. Et Lorelei ne lui en tenait pas rigueur. Même si au même âge que Seraphine elle aurait sans doute été perçue comme plus posée… elle ne valait pas mieux et, était probablement pire à l’époque. La nécessité des responsabilités acquisent un peu trop vite l’avait forcé à faire preuve de plus de maîtrise. Mais elle était à cette époque un concentré de pulsions qu’elle avait alors du mal à contrôler. A l’instant ou les Glimer avaient choisi la voie du pouvoir, ils avaient tous appris la patience. Ils ne préparaient plus leurs coups plusieurs jours en avance. Non, maintenant Lorelei planifiait des années en avance, avait découvert que sa patience pouvait être sans limite.

Quand à lorsque j’étais plus jeune… je n’avais pas de projet. Je vivais ma vie avec autant d'intensité que possible, c’était tout ce qui comptait. La seule différence est que maintenant je suis patiente et que je sais où je vais. Car, elle vivait toujours sa vie avec intensité. Alcool, drogue, sexe, violence, musique… Pour ceux qui la connaissait depuis toujours, la baronne était simplement devenue plus patiente. Mais ses activités en dehors du business restaient les mêmes. Après tout, son fief qu’elle avait nommé le Playground n’était pas un endroit où les plaisirs se vivaient avec mesure. Son fief était son terrain de jeu, l’endroit où elle vivait sans se restreindre de quoi que ce soit. Puis elle avait la chance d’avoir un organisme taillé pour les excès. Certains estimeraient qu’en approchant des quarante ans, je devrais vivre de manière plus paisible. Selon les standards culturels cela ne faisait aucun doute, mais elle se moquait bien des comportements attendus par la société. Mais pourquoi devrais-je le faire? Voulait-elle vraiment ressembler à ces types planqués dans leur tour à faire des plans, ignorants tout de la vie? Certainement pas.

Ça peut paraître bizarre je sais. Une baronne de la chimie qui veut mettre fin au règne des barons de la chimie. Après tout, quel baron serait assez fou pour être prêt à mettre fin au pouvoir qu’il détenait? Sauf que Lorelei n’avait pas pour projet de rester baronne. Ce statut qui lui offrait influence n’était qu’une étape. Le pouvoir n’était qu’un outil. Une lame aiguisée pouvait dissuader mais, c’était son usage qui faisait son intérêt. J’avais un peu plus de vingt ans quand j’ai été reconnue en tant que baronne. Je me suis contentée de prendre ce qu’on me donnait. Mais, avec ce statut, je n’ai pas juste accès au système, je ne me contente pas d'interagir avec lui. Je peux l’exploiter, le modifier et, le sapper. Etant donné que je sais ou je vais je n’ai pas à m’inquiéter de me perdre. Et je n'oublie pas que, le pouvoir n'est qu'un outil.

Vidant ce qui restait de la bouteille, elle se tourna ver la chanteuse, son regard perçant la fixant. Maintenant, j’ai une question. D’après toi, sachant que certains barons de la chimie seraient prêts à tuer pour savoir quelles sont mes intentions… Pourquoi est-ce que je te le donne à toi?

C’était étrange, beaucoup de personnes vivait leur jeunesse sans réel projets. Ce n’était pas le cas de la chanteuse, et c’était perturbant. Si elle n’avait pas eu de projets, ou bien même de but, sa vie aurait été bien chaotique. Après tout, chacun était différent, et Seraphine ne jugeait pas. « Que voulez-vous dire par intensité ? » Était-ce le fait de tester des expériences et vivre dans le danger ? Possible. « Comment la jeune Lorelei aurait réagi à notre rencontre ? Aurait-elle-même envisagé cette opportunité ? » Cette discussion, elle devenait de plus en plus personnelle que professionnelle. Mais était-ce si grave ? Si Seraphine devait travailler avec la baronne, c’était important d’en savoir plus sur elle, même si certaines de ses questions n’étaient pas forcément nécessaires.

Alors la baronne était dans la fin de la trentaine ? Seraphine l’aurait pensé plus jeune, malgré son visage décoré de cicatrices. La chanteuse haussa les épaules à la question de Lorelei. « Vous n’avez pas l’air du genre à vous soucier de ce que pensent les autres. L’avis de ces personnes n’est pas important. Du moins tant qu’ils ne vous posent pas de problèmes. » Être au pouvoir comme ça, ça devait être délicat. Une certaine image devait être gardée. Comme l’image que devait montrer Seraphine à son public. Si elle se laissait aller et faisait ce qui lui chantait, beaucoup de personnes ne la suivrait plus. « C’est comme travailler avec vous, certains me jugeront pour cela, mais je suis prête à prendre le risque. Pour pouvoir obtenir ce que je souhaite. »

« Oui, c’est étrange. » Mais parfois ne devait-on pas faire quelque chose qui nous déplait pour y mettre fin ? Cela semblait être les intentions de la baronne, justifié par les mots qui suivirent. « Vous avez toujours été opportuniste à ce que j’entends. » Si Lorelei passait d’étapes par étapes pour obtenir ce qu’elle souhaitait, Seraphine espérait réussir à faire pareil de son côté. Elle avait déjà commencé en soit. Commencer à se produire à Piltover, puis elle se produirait à Zaun, et enfin elle produirait pour les deux villes. Si tout se passait comme prévu. « Mais je comprends mieux la contradiction maintenant. »

La bouteille se retrouva vide, pourtant le comportement de Lorelei n’avait pas changé. Ou peut-être que si ? Puisqu’elle s’autorisait à dire à la chanteuse des choses qu’elle ne dirait pas aux autres barons ? « Parce que vous avez bu ? » Seraphine eut un rire léger, avant de reprendre rapidement son sérieux. « C’est une bonne question. » Mais la chanteuse avait-elle la réponse ? Non. Simplement des possibilités. « Je suppose que vous souhaitez me donner le point de vue de la plupart des Zauniens. Pour que cela m’aide à les comprendre un peu plus, et trouver les bonnes paroles lorsque je me produirais en leur nom. » Elle réfléchit un instant. « Je doute que ce soit pour une question de confiance ou pour me mettre à l’aise. » Non, la baronne n’avait pas du tout l’air d’être ce genre de personnes. « Peut-être que vous testez quelque chose, en me posant cette question. »

Séraphine n’était pas un mauvais pari. Elle manquait sans le moindre doute d’expérience à l'inverse de la baronne mais, des vies différentes amenaient à des résultats différents. Et, même si elle avait vécu un parcours comme le sien, le résultat aurait été différent. Lorelei avait conscience que par nature, elle n’était véritablement complète que lorsqu’elle se laissait aller. Lorsqu’elle abandonnait tout contrôle, qu’il ne restait plus que la violence. Ainsi maintenait-elle un rythme complexe et délicat, un équilibre entre maîtrise et rébellion. Mais si la chanteuse manquait d’expérience, elle avait tout le temps de se rattraper à ce sujet. Alors peut-être était-elle trop douce mais cela n’était pas un défaut en soit. L’idéal que Lorelei poursuivait était condamné s’il n’était pas confronté, assimilé, altéré. Tu fais erreur si tu penses que je veux t’aider à comprendre les zauniens. Je ne pense pas qu’il y ai de bonne parole. Ni de mauvaise parole. Quelles que soient tes actions, celles-ci amèneront une réaction, ni plus ni moins. Je te donne ma vision, d’autres voient les choses autrement.

Et que sa vision de Zaun ne soit pas partagée pas tous n’était pas un problème. La question était de savoir jusqu'où les autres étaient prêts à aller au nom des idées qu’ils avançaient. Pour la plupart d’entre eux, Lorelei ne pouvait ressentir presque rien d’autre que du mépris. La justice? La paix? La liberté? Qu’étaient-ils vraiment prêts à sacrifier? Leur vie? Aisé. Leur âme? Tout aussi aisé. Leurs proches? Ceux qu’ils aimaient? Tout de suite la plupart d’entre eux reculaient, hésitaient. Alors, sacrifier l’idéal même en son nom? Elle ne croyait pas que d’autres qu’elle et les siens en seraient capables. Peut-être certains rares élus… Sa propre fin faisait partie du processus, il ne s’agissait pas d’un sacrifice. Juste d’un absolu. Mais elle était prête à sacrifier son idéal pour celui là même.

Quand à un test… Tu n’es pas si loin La baronne sortit de nouveau sa pipe, la rallumant. J’en profite pour te jauger, pas te tester. Ce que tu feras de ce que je t’ai dit pourrait presque uniquement ne concerner que toi. Tout comme, tu pourrais choisir de révéler mes intentions à tous les barons, aux instances dirigeantes de Piltover aussi… Certains ayant une vision globale n’apprécieraient pas ce qu’ils comprendraient. Profonde inspiration, la braise de sa pipe rougeoyant. Lorsqu’elle recrache la fumée, elle libère un large cercle qui disparaît rapidement. Mais à l’image de ce rond de fumée, le saisir est impossible. Comme il sera impossible non pas de m'arrêter mais, d'arrêter ce que je déclenche. Ma mort n’aurait aucune importance. Elle vivait une existence sans remords ni regrets, détachée de la peur de sa fin et du néant inévitable de l’existence.

Non, ce qui importe est l’Idée. Ou l’idéal si l’on veut donner une orientation positive. En transmettant cette Idée que je poursuis, même partiellement, celle-ci voyage et se transforme. Peu importe que mon existence prenne fin, l’idée continuera d’exister. Et même si tu choisis de garder tout cela pour toi, mes paroles t’auront influencée et tu influencera les autres. Se nourrir d’autrui et nourrir autrui de soi. Car les hommes meurent, pas les idées. Léger silence. Le système dans lequel nous vivons toutes les deux a été bâti sur la domination d’une majorité par une minorité. Une minorité qui n’a pour véritablement assoir sa domination que le mensonge. Diviser pour mieux régner. La plupart des individus se mentent à eux même, pour se rassurer, se protéger… rassurer leurs proches et les protéger. Ou tout simplement pour conserver un quelconque pouvoir. Et tous ces mensonges interagissent entre eux, se mélangent pour former un système. Et lorsque tout le monde ment, dire la vérité n’est pas juste un acte de rébellion, c’est le premier pas vers la révolution. Et avec la révolution vient la fin du système.

Son don à Seraphine, il était limité. Même si elle pouvait entendre les émotions des âmes, elle ne pouvait pas non plus lire dans les pensées. Elle détestait se tromper, et elle venait tout juste de le faire face à la question de la baronne. Parfois, lorsqu’elle ne réfléchissait pas assez, elle se laissait aller parce ce qu’elle voulait entendre, et non par ce qui se disait réellement. Elle tenta de se rattraper, malgré qu’elle ait en face d’elle une personne douée en répartie et des plus raisonnées. « Ma façon de percevoir les choses n’est pas bonne, n’est-ce pas ? » Elle avait beaucoup de travail à faire, sur sa façon de penser. Il fallait qu’elle sorte de son monde, et qu’elle se mette à la place des autres. Qu’elle pousse plus loin. Dire qu’en un seul point de vue, il s’agissait d’un point de vue global, c’était moyen. « Dans tous les cas, votre vision des choses va m’être utile, j’en suis certaine. » Et des réactions elle en créerait. Peu importe qu’elles soient bonnes ou mauvaises.

Alors comme ça, la baronne l’analysait ? Si tester et jauger étaient des termes qui se ressemblaient, ils avaient tout de même une différence. « Pourquoi irais-je m’amuser à raconter vos intentions aux autres barons ? » Si d’autres aurait fait n’importe quoi pour avoir ces informations et les divulguer partout, ce n’était pas le cas de Seraphine. Pourquoi ferait-elle ceci ? Qu’est-ce que ça lui apporterait ? Juste un frein dans ses projets et des histoires dans lesquelles elle ne voulait pas être mêlée. « Toutes les morts ont de l’importance. » Mais que pouvait-elle réellement dire là-dessus ? Elle n’avait jamais perdu qui que ce soit la chanteuse.

« Je comprends pourquoi vous êtes l’une des dirigeantes de Zaun. Vous savez trouver les mots pour exprimer ce que vous pensez. ». Lorelei partait dans un discours complexe dont Seraphine n’avait pas encore l’expérience et la connaissance pour débattre, mais elle garderait ceci dans un coin de sa tête. « Vous savez je n’arrive pas à tout suivre, mais j’ai saisie l’idée principale. » Elle se gratta la tête, gênée d’avouer que Lorelei portait un discours encore bien trop difficile pour elle. « J’ai rarement rencontré des personnes aussi inspirantes. » C’était la vérité. « Je suis sûre que vous réussirez à mettre en œuvre ces idées. » Seraphine restait dans cet état d’esprit optimiste et idéaliste. « Quant à moi, je me nourrirais de toutes ces émotions pour mener ma propre révolution. »

Il fut aisé pour la baronne de percevoir ce qui pour elle était sans doute le plus gros défaut de la jeune femme. Une phrase avait suffit. Il n’y avait rien de bien difficile à vrai dire. Si Lorelei avait fait preuve d'honnêteté, Séraphine l’avait d’une autre manière été bien plus. Baronne de la chimie, idéaliste implacable et meneuse dévouée. Chanteuse inspirante, jeune femme sensible et enfant sensible. Lorelei vivait sa vie guidée par un équilibre entre contrôle et abandon mais, s’évertuant à toujours dire la vérité, elle avait appris à maîtriser les nuances de l’absence de mensonge. Il lui était aisé de n’exprimer que ce qu’elle désirait, de percevoir l’importance d’une simple phrase. Séraphine était plus douce qu’elle et, n’avait pas encore accumulé assez d’expérience pour être vraiment sûre d’elle. Surtout face à quelqu’un comme elle.

Je te rassure, il n’y a pas de mauvaise manière de percevoir le monde. Juste des visions différentes. Profonde inspiration, fumée de tabac recrachée. Non, décidément le tabac seul lui semblait fade à présent. Nous interprétons ce qui nous entoure de par notre vécu et, notre nature. Par exemple, lorsque tu considères que toute vie est importante. A l’inverse, pour moi la vie n’a aucune valeur en soi. Ton attachement émotionnel à la notion de vie est différent du mien. Est-ce que cela implique que j’ai raison? Que mon point de vie a plus de valeur? Uniquement car j’aurais vécu une vie plus difficile? Non. Lorelei n’avait aucune difficulté à donner à ses opinions plus de poids. L'expérience et un discours maîtrisé étaient des atouts non négligeables. Elle avait plus d’une fois eu l’occasion d’être confrontée à ses idées, à devoir faire des choix. A devoir prendre conscience de jusqu'où elle aurait à aller et, pouvait aller. Ne pas se fixer de limite était aisé pour elle, l’avait toujours été. Mais pour une personne comme Séraphine qui n’avait pas forcément eu affaire à l’adversité de la même manière que Lorelei…

Elle avait conscience de son essence, de la manière dont elle l’influençait. Elle savait comment maîtriser celle-ci, comment et quand l’exploiter. Une nature violente une fois sous contrôle était un atout incomparable. A l’inverse, une nature paisible pouvait être un carcan constant. Peut importait la situation, la baronne de la chimie n’avait qu’une seule nécessité, savoir quand canaliser sa hargne, comment juguler ses instincts. Et quand il fallait se déchainer. Si il est vrai que j’ai plus d’expérience que toi, imagine comment, dans dix ans tu pourrais être. La pensée évolue. Par exemple, parlons de moi. Celle que j’étais à dix ans aurait eu des étoiles dans les yeux en te rencontrant, sans le moindre doute je n’aurais pas été la même aujourd’hui. Même si, mon essence n’aurait pas changé, mon rapport au monde aurait été différent. A l’inverse, l’adolescente de quinze ans n’aurait probablement pas été capable de prêter attention à autre chose que ton joli minois. Et celle que je suis maintenant voit ton potentiel, ce que tu peux faire et devenir. Comment t’influencer.

Tour de passe-passe, la pièce qu’elle avait jeté en l’air précédemment réapparu dans sa main. Mais dans tous les cas, j’aurais certainement jeté cette pièce. De la même manière, si tu avais toujours vécu à Zaun, comment aurais- tu été? Et imaginons que, en étant une fille de Zaun tu m’ai en plus rencontré? Voir même, que tu ais grandi au sein de ma tribu… D’après toi, dans quelle mesure serais-tu différente de celle que tu es actuellement?

Les visions différentes, Lorelei insistait là-dessus. C’était un sujet compliqué, bien que logique. Mais comment la chanteuse pouvait-elle assembler toutes ces visions pour en faire une seule mélodie qui ait du sens ? C’était une question qu’elle étudierait lorsqu’elle retrouverait sa chambre où toutes ses notes étaient éparpillées un peu partout.

Comment elle serait dans dix ans ? Seraphine s’imaginait être là à produire pour Zaun et Piltover en même temps. Elle s’imaginer voyager dans d’autres pays, et chanter pour eux. Elle s’imaginait aussi être encore plus connue qu’aujourd’hui, non pas grâce à son succès, mais grâce à tous les messages qu’elle aurait fait passer. A la reconnaissance de toutes ces personnes qui souhaitaient être entendues. Peut-être que son destin prendrait une toute autre tournure, mais pour l’instant c’est ce qu’elle souhaitait être dans dix ans.

Les personnes changeaient de façon de penser au fil des années, mais comment serait celle de la jeune chanteuse si amoureuse de la vie, et des mélodies qu’elle entendait ? De cette jeune femme pure et gentille qui n’avait jamais connu de cruauté, dans toutes les formes possibles. Est-ce que le jour où ça lui arriverait, sa personnalité changerait également ? « C’est seulement la-vous de quinze ans qui trouve que je suis mignonne ? » Un peu de taquinerie dans cette conversation si sérieuse. « En ce qui concerne l’influence, vous êtes plutôt douée. » Mit à part des conversations suggestives, Seraphine n’avait pas eu beaucoup de retours objectives pour ses projets.

La pièce refit surface. Qu’est-ce que la baronne pouvait bien trafiquer avec ? « Elle sert à quoi, votre pièce ? » Peut être était-ce juste un jeu personnel ? En tout cas, Seraphine voulait comprendre le mystère de cette pièce.

A quel point serait-elle différente si elle avait vécu à Zaun ? C’était une très bonne question. La mélodie de Seraphine serait proche de celles qu’elle entend des Zauniens lorsqu’elle se balade dans les rues d’en bas. Elle réfléchit un instant. « Je ne sais pas. » C’était compliqué de se mettre à la place d’une personne avec une autre vie.« Je serais différente, c’est certain. » Mais est-ce que son don ferait sa différence, lui aussi ? « Peut-être que j’aurais été moins pure » Parce qu’elle était clairement dans un monde bien trop beau, Seraphine, pour réaliser la dure réalité qui se trouve ailleurs. « Peut-être que j’aurais souhaité changer ma condition, me révolter. » Parce que la vie que vivaient les Zauniens, ce n’était pas une vie dont on rêvait. « Mon don n’aurait peut-être pas été utilisé de la même manière aussi. »

N’y avait-il que la Lorelei de quinze ans qui trouvait Seraphine mignonne? Difficile de ne pas sourire à cette question posée avec humour. Pour la baronne la réponse était simple, elle aurait bien fait son quatre heure de la chanteuse. Une option qui, si elle ne l’oubliait pas, devait être mise de côté pour l’instant. Mélanger affaires et plaisir exigeait un équilibre délicat et, pour l’instant elle ne pouvait pas risquer le dit équilibre avec la jeune femme. Aussi utile que pouvait être l’affection, c’était un outil à double tranchant qu’elle devait manier avec précaution. Ses priorités n’allaient après tout pas à sa propre personne mais, à ce qu’elle visait. Qui sait? Je pourrais bien être tentée de faire de toi mon goûter. Sourire provocateur et humour. Le plus compliqué était toujours de garder suffisamment de distance pour ne pas perdre de vue l’ensemble, pour ne pas être esclave de ses émotions et de ses pulsions. L’humour était pratique pour garder cette distance dont elle avait besoin.

Quand à cette pièce… Elle fit passer le dit objet entre ses doigts avec dextérité, geste habitué. C’est une manière de déterminer mon destin. Aucune raison de dissimuler à quoi l’objet lui servait après tout. Lorsque certaines options s'offrent à moi et, que peu importe le choix cela me convient… Je laisse le hasard décider. Un moyen de ne pas oublier au passage les limites que la question du contrôle peut avoir. Tout était toujours question de contrôle. Non pas d’autrui mais, de soi. Si Lorelei ne se maîtrisait pas, elle ne parviendrait pas à accomplir ses désirs, se consumant plus vite que la mèche d’une chandelle. Mais à l’inverse, si elle étouffait ce qu’elle était, elle s’éteindrait. Ainsi la baronne deviendrait ce qu’elle détestait plus que tout au monde. Un être ne cherchant que le pouvoir et la richesse pour aucune autre raison que le simple fait de posséder. Ma méthode pour me représenter le destin.

Difficile de ne pas sourire non plus lorsque Seraphine exprima qu’en vivant à Zaun elle aurait été moins pure. Innocence presque confondante. Mais elle avait conscience qu’elle serait différente même si elle ne savait pas dans quelle mesure. L’exercice n’est pas facile je sais. Mais c’est un bon moyen de réussir à renouveler sa perspective. C’est aussi un bon moyen pour s’aider à se projeter dans le futur. Sans ça je n’aurais pas réussi à préparer ce qui doit encore se faire. Si l’adolescente qu’elle était autrefois ne s’était pas heurté à la réalité de sa nature et de sa condition, jamais elle ne serait ce qu’elle était aujourd’hui. Si elle ne s’était retrouvée forcée de percevoir autrement le monde que par le prisme de ses plaisirs.

Mais pour te rassurer tu serais restée toi. Différente oui mais toujours toi. De la même manière que, si la Lorelei qu’elle était avant ses sept ans avait disparu, elle serait restée elle même. Même si, Lorelei était le nom que lui avait donné sa mère adoptive. Pendant un instant, elle contempla le vide qui amenait à Zaun. De quelle manière était-elle tombée? De où? Peu importait qu’elle ne s’intéresse pas à ce passé disparu, la curiosité était toujours présente, élément de la nature humaine. Enfin, le temps passe, je te dirais bien que je ne veux pas abuser de ton temps mais, c’est moi qui ai du travail…

Si la chanteuse fit une taquinerie, ses joues devinrent rouges lorsque Lorelei répondit. Mais il ne s’agissait que de plaisanteries n’est-ce pas ? Seraphine eut un rire nerveux, sans pour autant répondre. Dans tous les cas, elles n’étaient pas là pour ça. Et puis ce n’était pas son genre de se laisser aller à ce genre… De choses.

Cette pièce. C’était celle-ci qui permettait à la baronne de faire un choix ? Prendre des décisions par le fil du hasard, n’était-ce pas risqué ? Certainement. Seraphine garda toutes ses questions pour elle à ce sujet. Elle se contenta juste de dire un « Une méthode intéressante. » Une méthode qu’elle ne pourrait pas utiliser. Elle ne pouvait pas se laisser guider par le hasard. Que ce soit dans ses projets, que dans les relations qu’elle entreprenait.

S’imaginer dans une autre vie, c’était un bon exercice en effet. Mais c’était difficile de s’y voir tant qu’on ne le vivait pas. Et si Seraphine était une personne très empathique, elle ne pouvait pas non plus ressentir ce qu’elle entendait. Son don avait ses limites, et peut être que ce n’était pas plus mal comme ça. Mais imaginer un autre cas de figure pour envisager l’avenir, ce n’était pas stupide. « Vous avez raison. La personne qu’on est au fond ressort forcément, malgré les épreuves qu’on endure. »

Lorelei devait déjà partir ? Mais quelle heure était-il ? Seraphine jeta un coup d’œil à sa montre et ses yeux s’écarquillèrent. « Oh déjà ?! Je n’ai pas vu le temps passer. » Elle avait été si plongée dans les discussions avec la baronne. En effet, il commençait à être tard. « Merci d’avoir pris le temps de discuter avec moi. » La chanteuse lui fit un sourire sincère, avant de sortir un bout de papier et d’y écrire quelque chose dessus. « Tenez. Écrivez-moi à cette adresse. Cela sera plus simple pour s’organiser. » Elles étaient deux femmes très occupées après tout.

« Prenez soin de vous Lorelei. A très bientôt. » Un dernier sourire fut adressé à la baronne, et la chanteuse prit le chemin pour rentrer chez elle.

Cet entretien avait été bénéfique pour Seraphine. Elle avait hâte de pouvoir échanger à nouveau avec la baronne, et de pouvoir enfin se produire en bas.

Son rêve, elle le réaliserait très bientôt. La chanteuse rêveuse en était persuadée.