Fear and doubt in time of crisis... ⬡ Caitlyn

Il est dit partout dans le monde que si une découverte scientifique d'ampleur doit avoir lieu, c'est à Piltover qu'un éminent chercheur la fera. N'en déplaise aux créatifs bas-fonds de Zaun, ou à l'étrange égalitarisme de Noxus, voilà une croyance populaire hautement véridique. Après tout, rares sont les nations à investir autant dans ses esprits, dans le progrès, dans le futur. Et rares sont les hommes et les femmes de ces autres grandes puissances à se consacrer jour et nuit à l'étude des phénomènes de ce monde. Tout cela fait donc que c'est dans le Quartier Nord de la cité côtière la plus en avance sur son temps que de brillants cerveaux se rencontrent, d'abord à l'Académie, puis dans les nombreux laboratoires des Maisons capables de fournir matériaux et technologies de pointe.

Exemplaire entre tous, le clan Ferros met tout ce qui est possible à disposition de ses élites intellectuelles, de ses ingénieurs d'exception. Parmi eux, un nom se détache du lot, un nom bondit, car associé à la plus grande valeur de Piltover: Jayce Talis, le fondateur de l'ère de l'Hextech. Recruté après un passage remarqué au sein de la Maison Giopara, il s'est avéré être un investissement rentable, si ce n'est juteux, pour les Ferros, qui lui laissent d'ailleurs toutes latitudes pour... inventer des choses. Car tel est son don.

Au travail depuis tôt ce matin, à croire qu'il dort au milieu des écrous et des vis, Jayce crayonne, annote, raye, barre, modifie, se bat, se débat avec les plans d'un prototype révolutionnaire, mais encore trop coûteux... que ce soit en énergie, ou ressources. Et la solution, qui d'ordinaire lui apparaît une fois les premières contrariétés passées... eh bien, elle ne vient pas. Elle tarde. Elle se fait attendre. Terriblement, même. Une vraie source de frustration. Pourtant, il aurait dû s'en douter; le seul sujet qui lui importe aujourd'hui, c'est cette brume noire venue des Îles obscures. Son origine, ses effets, sa composition chimique, et comment s'en protéger.

Parce que tant qu'il n'aura pas résolu cette énigme, tout avenir se trouve compromis. Le futur n'est plus assuré. Seule la lutte contre les Ténèbres prévaut, donc. Mais pour le moment, rien de nouveau à l'horizon, si ce n'est une attente interminable. Jayce doit ronger son frein, ce qu'il déteste faire... surtout qu'avec ça en tête, il ne parvient pas à être aussi efficace qu'il le voudrait.

Sauf que dans le cas d'un véhicule volant auto-propulsé par un moteur Hextech, la moindre erreur de calcul peut s'avérer désastreuse... fort heureusement pour la santé du Protecteur de Piltover, le prototype est encore loin d'être prêt. Pour le moment, coincé dans ce laboratoire Ferros, un crayon à la main, le cerveau turbinant à toute allure, il se contente bien mal d'une première ébauche dessinée, avant d'un jour pouvoir passer à la vitesse supérieure...

Spoiler:

Ce n’était pas rare de voir le Shérif s’élancer dans les rues d’un pas determiné, s’avançant vers les ateliers du clan Ferros où elle ne cherchait pas l’un des membres éminents - et un peu effrayants - du clan, mais bien leur plus talentueux inventeur, et son meilleur ami : Jayce. La conversation avec Vi au sujet de la brume quelques jours plus tot et leur quête assidue de renseignements qui n’avait rien donné était une motivation nécessaire et suffisante a finalement revenir sur ce qu’elle avait pensé au départ. Jayce aurait peut être une solution, et si il n’avait pas d’idées, ils en trouveraient ensemble.  Ne venant dans la Cour du vent bleu que pour le voir ces derniers temps, elle n’avait néanmoins pas de mal à retrouver son chemin vers l’atelier où des bruits se faisaient déja entendre.  Sur quoi travaillait Jayce ? La question pouvait se poser, mais elle savait qu’elle aurait bientôt une réponse, peut être une réponse bien trop détaillée pour celle qui avait choisi de devenir policière plutot qu’inventrice ou politicienne comme l’aurait voulu ses parents.

Quelques secondes elle s’arrêta devant l’entrée du batiment, regardant le laboratoire et le visage de Jayce visiblement concentré sur son croquis. Combien de fois avaient ils joués l’un et l’autre à se faire peur ? Combien avaient ils grandi depuis ces moments d’entente fraternelle ? Combien les choses avaient elles changées ? Elle se laissa aller quelques instants à des pensées du passé, et puis finalement elle se reprit, abandonnant des souvenirs mutins pour le serieux d’un présent et de la situation.

— Talis. Si de manière générale se faire haranguer par le shérif de la sorte n’avait rien d’enviable, le ton qu’elle utilisait quand il s’agissait de Jayce était on ne peut plus amical, avec une once de taquinerie présente malgré tout. Tu as l’air concentré par ton …. Projet ? lança t’elle, amusée, alors qu’elle bougeait pour se rapprocher de lui, regardant par dessus son épaule pour voir le véhicule qu’il venait de dessiner. Des véhicules volants vraiment ? Sourcils froncés, elle regardait un peu mieux son croquis, les espèces d’ailes bardées de réacteurs, les sieges, et l’énorme espèce de … moteur. Tu penses que ça marcherait ? Et elle, l’espace de quelques instants, elle oubliait la brume pour se trouver fascinée par le projet de son ami.

Placer le moteur hextech ici, à l'avant ? Nan, cela risquerait de déséquilibrer l'ensemble de la structure... la compenser ailleurs serait problématique; trop lourd, l'engin risque de ne tout simplement pas vouloir décoller. Cela pensé, allonger la mécanique sous toute la longueur du capot permettrait de mieux répartir les masses, en un tout cohérent, avec l'échappement pointé vers le bas, et l'arrière. Ce n'est pas encore ça, mais cela va demander des tests, beaucoup de tests pour s'en assur...

— Talis.

- Que...

Si les choses venaient à ainsi continuer, Jayce ira bientôt se mettre à croire que Caitlyn et Vi se sont passé le mot pour le faire sursauter. Car c'est bien l'effet que provoque ce fin "Talis", prononcé avec un bel accent piltovien comme on les aime de ce côté de la ville. Plongé dans le fonctionnement interne de sa réflexion, avancée mais décevante à la vue de ses attentes, il tressaille un bref instant, avant de fermer les yeux d'agacement.

Pour lui, plus que pour quiconque autour, il marmonne quelques paroles ronchonnes, dignes de l'homme qui n'a pas dormi ces trente-deux dernières heures qu'il est:

- Hrm... faudrait pas que ça devienne une habitude non plus...

Cerné, un peu échevelé, il fait alors face à son amie, l'une de ses plus fidèles et plus anciennes camarades. Quelqu'un qui a eu le chic de ne pas le trahir, et de ne pas mourir. Dans son milieu, ils ne sont pas beaucoup à pouvoir prétendre faire mieux. Alors, malgré cette interruption fortuite, parce que la vision de ce grand haut-de-forme bleu le réjouit, il lâche un grand sourire fatigué. Et un vrai de vrai, pas un de ceux qu'il réserve aux bons citoyens de Piltover durant ses opérations en ville.

- Cait. Ca me fait plaisir de te voir. Navré de ne pas pouvoir t'accueillir mieux que ça, je suis...

Défaillant ? Inefficace ? Incapable ?

- ... occupé.

Cela n'a beau être encore qu'un dessin technique, le scientifique s'écarte légèrement pour permettre à la Kirraman de jeter un autre coup d'œil à la machinerie esquissée. Qui sait, peut-être qu'elle devra un jour faire gérer la circulation aérienne de ce genre d'engin à de jeunes bleusailles déterminées... Le maigre doute qu'elle laisse planer fait cependant hausser un sourcil à Jayce, qui ne peut s'empêcher de répliquer un peu sèchement:

- Mon projet, oui. Certains Yordles fabriquent bien des aéronefs monoplaces pour parcourir tout cet espace au dessus de nos têtes, pourquoi pas nous ? Ca placerait Piltover encore plus en avance sur le reste du monde, ce que nous voulons tous. Le Progrès, Caitlyn, le Progrès...

Mais comme si cet orgueilleux effort avait eu raison de toutes ses forces restantes, ses épaules s'affaissent brusquement.

- Mais...

Et d'un coup, il frappe fort sur son espace de travail, les nerfs en pelote.

- Mais ça ne veut pas s'assembler correctement dans ma tête !

La main endolorie par le choc, la douleur le ramenant soudainement à la réalité, il soupire, et ne sachant quoi faire d'autre, se laisse glisser le long de la table, vidé. Son regard suit alors la jambe de son amie, et remonte jusqu'à son visage. Là, l'œil humide, il baisse enfin la tête, honteux de son soudain éclat.

Comment aurait elle pu ne pas être amusée par le presque sursaut de son camarade, le tressaillement qui le prit alors qu’elle arriva derrière lui en prononcant son nom. C’était toujours un peu amusant que de le surprendre comme ça, et si bien sur elle ne l’aurait pas fait à n’importe quel moment - pas quand il travaillait sur une machine dangereuse par exemple - ce moment la avait été tout choisi. Gardant un sourire aux lèvres elle lui rendit le sien, tout aussi sincère mais néanmoins un brin moins fatigué. Grace a l’intervention de Vi quelques jours plus tot elle avait fini par prendre une vrai nuit de sommeil - en plus de ce moment passait à dormir au bureau, pas qu’elle n’en soit fière - et ne s’en trouvait que mieux. — Une habitude ? D’autres personnes s’amusent à t’effrayer ? Peut être que je devrais poster quelques gardes derrière toi pour te surveiller ou te proteger je ne sais pas trop. Elle plaisantait bien entendu, jamais elle ne ferait ça. Mais rien que pour voir sa réaction c’était une proposition qui valait le coup d’être vocalisée.

— Occupé oui, je peux voir ça. Bougeant un peu autour de lui, elle se rapprocha pour admirer la machine qu’il était en train de dessiner. Il n’avait pas tort, les Yordles avaient des machines volantes personnelles, et si Piltover avait réussi à mettre à jour des tramway et des aeronefs spacieux, ce n’était pas pour autant que les individus avaient des véhicules personnalisés. Oh, elle imaginait déja a quel point cela serait catastrophique dans les rues, remplacer les chevaux par des véhicules pour faire des trajets jusqu’a Shurima ou même inventer des bateaux volants pour survoler l’océan et aller à Ionia ou Freljord. Je peux comprendre l’attrait oui. Le progrés aprés tout, c’était bien ce qu’ils representaient ici, la ville du Progrés. Une ville qui serait malheureusement peut être bientot enveloppée sous la brume, mais ça, c’était une histoire à la quelle elle essayait de ne pas penser pour le moment.

Le visage un peu plus fermé, elle ne tressaillit pas alors qu’il tapait son plan de travail, et secouant la tête elle s’agenouilla finalement en face de lui. — Ça va aller Jayce, tu ne peux pas avoir réponse à tout, pas toujours dans l’immédiat. Tu as déja apporté beaucoup à Piltover, et ça ne va pas s’arrêter ainsi. Les mots toujours trés calmes, trés posés. Montre moi ta main. Un ordre alors qu’elle tendait sa propre main gantée en attendant de s’assurer qu’il ne se soit pas fait trop mal en frappant les outils sur la table. Depuis combien de temps n’as tu pas dormi Jayce ? Son regard semblait un peu flou, son oeil humide, mais surtout, tout dans sa posture indiquait qu’il n’allait pas trés bien.

Des gardes ? Dans son dos ? CONSTAMMENT ?! Voilà quelque chose qui fait hausser un sourcil d'indignation à l'ancien conseiller. Sans même penser à quel point cela bafouerait son ego, il sait déjà très bien se défendre non mais, assigner des hommes à sa protection les empêcherait d'être efficace sur le terrain, là où les citoyens de Piltover ont vraiment besoin d'eux. Ce qu'il exprime tout de go, après quelques secondes de silence.

- Ce serait gaspiller des ressources...

Croiser une nouvelle fois le regard de son amie suffit à lui faire comprendre... qu'il a pris cette remarque amusée un peu trop au sérieux.

- Oh. Tu plaisantais. Bien sûr.

Bien sûr ! Si quelqu'un sait gérer ses hommes, c'est bien le Shérif, bon sang de bois. La Kirraman a su prouver au fil des années être on ne peut plus qualifiée pour le poste; Jayce n'en a jamais douté. Sauf peut-être cette fois où elle lui a annoncé que la pègre de Zaun était dirigée d'une main de fer par une unique personne. Depuis, parce qu'elle avait raison, il n'a plus jamais remis en question ses intuitions. Presque plus jamais. Moins souvent, en tous cas.

Avec un grognement, mélange de résignation et de douleur, il tend enfin sa main blessée. Ce n'est pas grand chose, et il le sait déjà. De ce choc naîtra un bel hématome, rien de plus. Mais permettre à son amie de l'examiner, c'est un peu le prix de la paix entre eux; quand elle donne des ordres, elle s'attend à ce qu'ils soient exécutés.

- Je n'ai pas le temps de dormir, Caitlyn. Au-delà de nos murs s'étend une menace dont je ne sais rien. Une menace que je ne peux pas... contrôler.

Parce qu'il s'agit de ça, encore.
De contrôle. De maîtrise. De perfectionnement. Quand il s'agissait de rendre la vie des gens meilleure, plus simple, plus confortable, il pouvait se permettre d'y aller étape par étape, au gré de ses folles inventions. Aujourd'hui, la situation est bien différente. Le monde est lancé dans une ultime course contre la montre, rien de moins.

- Si nous n'arrêtons pas cette brume, il n'y aura plus de futur. Plus de progrès. Plus de Piltover. Plus rien. Ca me rend fou que personne d'autre ne s'en rende compte ! Le Conseil accorde trop de crédit à notre technologie. La population croit trop... en moi. Mais je n'ai pas les armes pour lutter...

Et cela le crispe, le démange, le torture, au point de faire briller ses yeux d'une bien triste humidité, au point de craqueler en de trop nombreux points la surface de golden boy qu'il arbore nonchalamment depuis des années déjà. Tout ça parce que...

- Je ne sais pas quoi faire, Cait.

Bien, Jayce avait l’air de tout prendre au sérieux, et Caitlyn pencha quelques instants la tête sur le coté, une lueur taquine dans les yeux qui ne disparaissait pas malgré le sourcil qui se arqua, curieux, et un peu las. — C’était une plaisanterie oui Jayce, je n’ai pas que ça à faire de faire garder l’arrière train de quelqu’un qui est tout à fait capable de le proteger lui même. Même si elle devait reconnaitre, en toute honnêteté que quelques fois, Jayce allait beaucoup trop loin pour lui même. Oui, quelques fois les expériences qu’il pouvait faire, ou même son esprit un peu trop explorateur, ingénieux, en soif de progrès, pouvait le mener trop loin, et dans ces cas la, elle aurait parfois oui, aimé pouvoir être la pour le protéger. Il était quelqu’un à qui elle tenait vraiment, et savoir qu’il était quelques fois assez bête — par trop d’intelligence — pour foncer tête baissée dans les ennuis, la contrariait au plus haut point. Ce n’était pas le sujet.

Secouant la tête, elle regarda sa main, et grommela quelque peu. — Un beau bleu, rien de plus. Estime toi heureux de ne pas avoir tapé sur un clou ou quelque chose qui aurait pu te trouer ou t’infecter. Ça devait s’entendre dans sa voix qu’elle était lasse de tout ça, qu’elle était clairement epuisée des gens qui se blessaient, et qu’elle devait soigner ou reparer un peu trop souvent.

Lachant la main néanmoins elle se laissa finalement tomber les fesses sur le sol en face de son ami, qui parlait du réel problème. Ce même problème qui l’avait empêché de dormir et qui aurait continué de le faire si Vi n’était pas intervenue, ce même problème qui hantait ses nuits et ses jours.

— Je sais. Un soupir quitta les lèvres fatiguées de la Shérif, qui posa méthodiquement son haut de forme sur le sol à coté d’eux, avant de regarder droit dans les yeux de Jayce, le héros du futur, le protecteur de Piltover. Vi a du me forcer à dormir l’autre jour parce que je ne voulais plus lacher mes recherches. Est ce que tu imagines Jayce que ma coéquipière casse cou a du être la voix de la raison ? La moue fut passablement amusée sur son visage fin, et ses yeux brillèrent légèrement. Mais la menace était bien trop importante pour qu’elle se perde dans de telles réflexions.

— Mais nous avons fait quelques recherches, nous avons grapillés quelques informations. Parce que tout comme toi je crains que notre technologie ne soit pas suffisante. Parce que tout comme toi j’ai peur. Doucement, elle posa sa main sur la sienne, tentant de le rassurer tout en se rassurant également. Je suis venue te voir pour te parler de ça. Oubliée pendant quelques instants la voiture sur la quelle il travaillait. Oubliés leurs travaux divers. Non, il n’y’avait que la ruine.

— Est ce que tu t’es demandé pourquoi la Brume avait attaquée Demacia en premier ? Loin de Bilge et de ses nuits de l’horreur ?

Un petit grondement haché, régulier se met à secouer l'inventeur, alors qu'il laisse sa main être examinée, plus docilement que d'ordinaire. Ce bruit, un peu étrange, un brin rouillé, continue quelques secondes, avant que l'évidence ne se fasse: Jayce rit. Tout simplement. Il pouffe aux mots de son amie, des propos qui convoquent dans son esprit pourtant très occupé de bien merveilleuses images.

- Vi, la voix de la raison ? Ca me donne presque envie de me moquer de toi, Caitlyn. Presque.

Oh, il tente de ne pas céder, oui. Lèvre mordue de rétention, sourcils froncés de concentration... mais rien n'y fait. La simple idée d'une Vi posée, raisonnable, c'est juste trop. Alors, l'oeil luisant de taquinerie, et le sourire en coin, il cède:

- Bon, allez, un petit peu quand même. Ah ah !

Cela ne dure malheureusement pas.
La réalité revient le percuter avec la délicatesse d'un guerrier noxien assoiffé de gloire et de sang. Rire, il pourra le faire plus tard, quand les temps seront plus cléments, quand le monde pourra souffler, libéré de la menace de cette brume cataclysmique.

- Hrm... jeeeee... je ne crains pas que notre technologie ne soit pas suffisante: j'en suis sûr et certain. Tant que ne nous ne parviendrons pas à en savoir davantage sur ce qui se profile, nous n'aurons pas l'avantage. Et sans avantage, nous sommes désarmés.

Or, pour générer pareil atout, il faut du savoir, des connaissances.
Pile le genre de choses que souligne la Shérif, avec quelque parole qui pique immédiatement l'égo de Jayce. Gonflé d'orgueil, la douleur dans sa main et la fatigue de ses trop courtes nuits ne sont plus rien, et le voilà déjà bondissant sur ses pieds, à la recherche d'un de ses tableaux à roulettes en particulier.

- Bien sûr !

A grands pas énergiques, il écume son laboratoire... d'un leste mouvement, il fait pivoter ses surfaces d'écriture, témoins de son génie, ou en tous cas de son inébranlable imagination. Tableau un ? Non. Le deux ? Pas plus. Le troisième lui fait lâcher une petite exclamation de joie, et il l'approche vivement de Caitlyn.

- Oui, tous mes tableaux sont comme ça, et non je ne m'y perds pas.

Un exemple de la plus pure des mauvaises fois.
Il ne perd toutefois pas une seconde, et pointe déjà du doigt et de la craie des choses, mots, symboles et dessins incompréhensibles pour le commun des mortels. Il n'oublie heureusement pas de faire la traduction.

- Ma théorie principale a pour point central la pétricite. Comme tu le sais sûrement, la faculté principale de ce minéral est de nullifier les effets magiques au contact. En les absorbant, certes, mais là n'est pas la question.

Autant showman que scientifique, il bouge, s'excite, gesticule en rythme avec les propos qu'il prononce. Puis, il s'avance vers son amie éprise de justice, et lance sa craie derrière lui, à l'aveuglette. Comme par magie, elle vient retomber pile dans son petit pot... pour le néophyte, cela pourrait sembler miraculeux, mais ce geste résulte surtout de profondes habitudes, plus que de talent.

- Comme tout en ce monde, la Brume doit avoir une source d'énergie. Selon moi, elle relèverait ici d'une origine magique. Quelle est-elle ? Où se trouve-t-elle ? Des mystères encore à élucider. En attendant, Démacia pourrait avoir été visée pour ça: se débarrasser d'un énorme épine dans le pied, avant même qu'elle ne puisse se planter dedans. Oui, il aurait été idiot de ne pas profiter de l'effet de surprise pour ça... ce qui démontrerait une conscience derrière ces attaques, et pas une simple force de la nature... hrm.

Sa main vient doucement rejoindre son menton mal rasé, l'air pensif.

- Mais sans preuve, ce n'est encore qu'une théorie.

Comment ne pas esquisser un sourire quand il lui fait remarquer lui même que considérer Vi comme la voix de la raison pour quoi que ce soit est totalement ridicule ? Non, quand il évoque l’idée de se moquer d’elle, elle ne peut même pas lutter, et malgré sa tête contrite, elle finit par esquisser un rire elle aussi. — Rappelle moi de ne plus rien te raconter. sa tête est presque boudeuse maintenant, et elle est ramenée à bien des années en arrière quand les deux plaisantaient l’un et l’autre comme deux frères et soeurs qu’ils étaient presque, quand les Kiramman etaient les mécènes de Jayce encore, et quand tout allait presque bien, avant les explosions, avant les drames, avant tout.. Elle ne voulait pas penser à ça pourtant, non, et si le rire dura un léger temps, le sérieux revint malheureusement.

Avec le serieux la brume. Avec la brume la conversation pressante qui les prend. Et c’est en plissant les yeux qu’elle voit Jayce s’agiter comme un lapin dans un environnement rempli de carottes. Les mots qu’il évoque sont véridiques et elle hoche la tête en le regardant bouger partout. — C’est ce que nous avons commencé à chercher Vi et moi. Et la raison de nombreuses insomnies, la raison de nombreuses nuits durant les quelles Caitlyn parcouru bien trop d’ouvrages pour son bien, fait bien trop de recherches.

Amusée, elle regarde les tableaux se succeder maintenant, et si elle hoche un sourcil sans rien dire, il s’explique quand même, provoquant un sourire de sa part. — Loin de moi l’idée de juger un tel…. désordre. Le sourire reste, beaucoup plus leger maintenant alors qu’il lui évoque une théorie qui pourrait presque sembler logique. Demacia est célèbre pour son bois anti mage, et elle serre les dents, car si cela est vrai, ça pourrait induire beaucoup trop de choses pour les quelles personne n’est prêt. Sourcils froncés elle attend qu’il finisse son speech digne d’une présentation devant le conseil. Tout ce qu’il dit touche quelque chose qui lui semblerait juste, mais comme il le dit si bien, ce n’est qu’une théorie, tout comme celles qu’elles ont pu avoir avec Vi quelques jours plus tot.

— Oui, mais et il est la le mais, le contre argument à un plaidoyer pourtant si bien pourquoi maintenant alors que les nuits de l’horreur frappent Bilgewater depuis tant d’années ? Et pourquoi s’épuiser à se débarasser d’une région qui de toute façon ne vit que pour elle même, loin de tout. Elle n’est pas stupide Caitlyn, loin de la, ce n’est pas parce qu’elle a rejoint les forces de l’ordre qu’elle n’a pas un cerveau qui fonctionne. De ce que l’on sait, seules les artères principales de la capitale ont été touchées, la forêt de Petricite n’aurait pas été visée, et bien entendu le gouvernement démacien refusera de nous en dire davantage. Elle se leve maintenant de l’endroit où elle s’était appuyée, et commence à bouger dans la pièce trouvant une carte du Monde pendue quelque part, et attrapant une craie. L’idée néanmoins qu’il y’ait une conscience comme tu dis derrière cette attaque semble la plus logique, et la plus effrayante également. Quel mage serait assez puissant pour controler des spectres, de la brume noire, et corrompre des dragons ou d’autres individus ? Sans compter que la traversée des îles obscures jusqu’a Démacia a probablement du passer par un portail. Elle reflechit encore Caitlyn jouant avec la craie qu’elle a volée a Jayce.

— Que connais-tu des îles obscures ? Et est ce que le terme Sentinelles te dit quelque chose ? Des légendes sur un ordre ancien qui n’aurait que quelques survivants. Des legendes toujours, car ils ne peuvent se baser sur rien d’autre, et cette fois, elle pousse un soupir un peu plus las.

La lourdeur du moment s'estompe un petit peu. Des expressions sincères sont échangées, tantôt attendries, tantôt amusées. Il faut dire qu'entre eux deux existe bien plus qu'une simple relation de façade; depuis des années, et des années, et des années, leur amitié tient bon malgré les épreuves. Rares sont les histoires à vivre aussi longtemps, sans verser dans le drame, la haine ou l'oubli. Jayce n'en a que trop bien fait l'expérience...
Avec un plaisir certain, l'inventeur lâche son fameux sourire en coin, celui qu'il réserve pour ces moments spéciaux, avant de taquiner un bon petit coup son amie:

- Toi, ne plus rien me dire ? Essaie donc, ma chère Caitlyn, essaie donc.

Elle le mérite bien, vu les piques qu'elle ne se prive pas de balancer. Comment ça, son atelier manque de clarté ?! Non, non, pas du tout ! Son organisation dépend simplement d'un système de pensée différent, inabordable pour tout esprit commun. Puisqu'il voit plus grand, il se doit de se pousser dans ses retranchements, et ce n'est pas du tout parce qu'il est un peu débordé en ce moment...

- Le désordre n'est qu'ordre incompris. Surtout celui-là !

Mais la détente ne saurait durer, quand le destin du monde est en jeu. Au moins dans la réflexion. Jayce rebondit immédiatement aux remarques de son amie sur la situation démacienne, intégrant à son grand plan ces nouvelles données... en vain, pour l'instant.

- Ce sont de bonnes questions. Je vois que tu as su mettre à profit le temps passé à mes côtés.

La détente ne saurait durer, certes, mais les tacles entre amis si, bien sûr ! Ils font partie du sel de toute bonne relation.

Jayce enchaîne ensuite, en allant perdre avec moult frustration ses mains sur ses tempes, puis dans sa chevelure.

- Cela me rend fou, mais... c'est encore un mystère. Complet, absolu, à couper au couteau.

Tout comme cette histoire d'Îles obscures et de Sentinelles, tiens. Qu'il est désespérant d'assister à sa propre déchéance intellectuelle; l'érudit n'est certes pas un historien, chose qu'il laisse bien volontiers au jeune Ezreal, mais quand même. C'est douloureux de ne pas pouvoir servir de référent du savoir, pour une fois...

- Il ne me vient que quelques histoires de croque-mitaines à dormir debout, et bien sûr ce que nous racontent nos livres d'histoire sur les origines de ces îles. Rien de neuf sous le soleil. Concernant les Sentinelles... ce ne sera guère mieux, je le crains. Tu connais davantage de choses sur elles, toi ?

— Quoi que, tu n’as pas tort, je suis sure que même si je ne te disais plus rien, tu trouverais un moyen de tout savoir quand même. Monsieur j’ai des relations partout. Et si elle est loin de se douter qu’il a une relation un peu complice, un peu étrange, avec sa coéquipière préférée, elle sait bien que Jayce sait comment obtenir des informations. Ça la détend en tout cas, c’est comme si d’être simplement dans cet atelier, ça lui permet de faire le vide sur ce qui la contrariait. Jayce est comme un grand frère, celui avec qui on partage des piques et des bons moments, celui avec qui on est pas toujours d’accord, mais auprès de qui on peut trouver du réconfort aprés une dure journée. C’est comme ça pour Caitlyn, elle se sent bien la, à taquiner le grand inventeur pour son désordre, secouant la tête à ce qu’il lui répond.

Mais voila, le moment redevient sérieux… Au moins aussi sérieux qu’il puisse l’être entre eux, et si la Shérif est rigide sur certains points, elle n’en est pas moins prompte à réagir aux tacles de son ami. — Ne prends pas la grosse tête, je crains que tu ne finisses par ressembler à ton cher et tendre marteau. Le sourire s’affaibli quand même un peu, alors que Jayce evoque les memes frustrations qu’elle, il est le cerveau et elle est l’enquêtrice aprés tout.

— Je sais, tous les contes sont obscurs, et les bibliothèques officielles ne nous aident pas vraiment. Certaines parlent de contes de fées, de la corruption des îles bénies par une histoire d’amour, mais c’était il y’a tellement longtemps qu’il est impossible de savoir à quel moment l’histoire vraie est devenue légende, puis conte pour enfant. Tout ce que l’on sait, ce sont les quelques rapports sur les nuits de l’horreur, mais envoyer quelqu’un enqueter à Bilgewater en quête de davantage de renseignement serait du suicide en ces temps dangereux. Elle parle beaucoup Caitlyn aussi, parce qu’elle a beaucoup réfléchi, parce que ce sujet l’a gardé éveillé bon nombre de nuits durant.

— Je sais juste qu’il s’agirait d’un ordre établi un peu partout. J’ai trouvé de vieux rapports manuscrits d’anciens Shérifs, mais rien n’est jamais clair, comme si tout devait être caché, si tout était un mystère. Il y’a un symbole, avec Vi on essaye de trouver des batiments qui puissent le porter sur leurs facades, mais c’est comme chercher un poisson précis dans la rivière…

"Monsieur j'ai-des-relations-partout" est bien obligé de se tenir renseigné tout seul, personne ne prend la peine de venir l'informer des points d'actualité chauds bouillants du moment depuis qu'il n'est plus conseiller. Vu sa grande réputation, il n'a pas été trop difficile à Jayce de trouver quelques sources sûres à Piltover, le genre à même de fournir des nouvelles bien fraîches. Soyons sérieux deux minutes, cependant: cela ne vaut pas dans sa globalité le réseau d'informateurs dont dispose aujourd'hui les forces des Pacifieurs. Mais poussé par une pointe d'orgueil, l'inventeur bombe le torse, et croise les bras.

- Qu'est-ce que tu veux, c'est ça d'être le Protecteur du Futur: on finit par avoir des yeux et des oreilles partout...

Toujours piqué à vif, Talis laisse traîner un regard affectueux quelques secondes sur son arme fétiche, appuyée contre un mur à quelques mètres de là. C'est vrai qu'il est quand même drôlement beau, ce gros tas de métal, de cuir et d'arcane. Et il représente à merveille tout ce qu'est le Jayce d'aujourd'hui: un pied nostalgique dans les traditions, un pied combattif dans le futur !

- Il est très bien mon marteau. Même s'il est un peu petit, c'est vrai.

Qu'est-ce que c'est agréable de ne pas être idolâtré par Caitlyn. Et ce n'est pas une bouffée de mégalomanie qui lui fait penser cela: où qu'il aille dans Piltover, on le reconnaît. On le reconnaît et on l'admire pour ses accomplissements, pour la mission qu'il s'est donné. Mais rares sont ceux à le connaître en profondeur, à l'apprécier pour qui il est. Ce que Caitlyn fait, avec beaucoup de détente et de simplicité. Cela le touche plus qu'il ne veut bien l'avouer, et il faut bien cette énigme autour des Sentinelles pour le sauver d'un quasi-submergement affectif.

Bras croisés, main pensive sous le menton, il vient s'emparer d'une de ses craies pour la tendre à la Shérif.

- Tu me le dessinerais, ce symbole ?

Quelques secondes passent durant lesquelles Jayce cherche un tableau assez vide pour dessiner dessus, un temps qu'il met aussi à contribution pour répondre à son amie, et proposer une idée plutôt intéressante à ses yeux.

- Hrm... je ne suis pas un de tes hommes. Je ne suis pas de la police. J'ai toujours eu envie de voir si les pirates de Bilgewater sont si bigarrés que ça. M'envoyer là-bas avec mandat officiel des forces de l'ordre piltoviennes ne te priverait pas d'un rouage essentiel au bon fonctionnement de la ville, et nous permettrait d'étudier un peu ces Nuits de l'Horreur. La solution se trouve peut-être là-bas, "à deux pas" de chez nous.

Comment est ce qu’elle pourrait ne pas rire quand Jayce parle de son marteau avec autant d’affection, ou quand Jayce a l’air un peu piqué dans le vif, ça l’amuse ses réactions, et à chaque fois qu’elle peut passer un moment avec lui, elle se rappelle pourquoi il est son ami, pourquoi elle se sent rassurée quand il est la. Et ça n’a rien à voir avec sa capacité de héros du futur, de champion de Piltover. Alors elle sourit un peu plus quand il parle de son marteau, et elle secoue la tête. — Tu sais tout comme moi que plus gros il ne serait pas vraiment maniable. Parfois il faut savoir se contenter d’une taille adéquate.  Le sourire demeure sur son visage, la plaisanterie est facile, elle n’ira pas dans le vulgaire comme Vi aurait pu le faire, mais l’implicite est la, voila tout ce qui est suffisant.

Ce n’est pas tout cependant, et le moment est bien plus grave maintenant, alors Caitlyn pousse un léger soupir, irritée par leur manque de connaissance. Bougeant un peu elle se saisit d’une des craies, se rapprochant du tableau presque vide qui lui est montré. — Je peux essayer oui. Et méthodiquement elle commence à dessiner ce qui ressemble a ce vieux symbole un peu étrange qu’lele a vu dans des livres. Une espece de losage posé sur un triangle, avec des symboles un peu etranges à l’interieur et des flammes léchant un soleil. Je ne suis pas sure que ça soit tout à fait ça, mais les rares livres qui en parlent traitent de cette légende. Peut être que la légende serait vrai, même si je me sens trés bête de me raccrocher à une légende comme ça. Un soupir est poussé, elle ne sait plus vraiment quoi croire Caitlyn, elle sait juste que les choses sont terriblement compliquées maintenant.

Et puis il y’a une proposition de la part de Jayce qui lui fait froncer les sourcils. — Mais t’envoyer la bas avec un mandat officiel ferait de toi une cible pour ceux qui n’aiment pas l’ordre. elle ne veut pas avouer, mais elle y pense déja, elle y reflechit à tout cela, l’idée de Jayce est tentante, et même brillante elle doit bien le reconnaitre finalement. Tête dans ses mains, elle exhale quelques instants, avant de se retourner vers lui. Tu réalises bien entendu les risques que cela serait ? et bien sur, elle est prête à accepter. Forcément.

Un bref sourire passe sur les lèvres de Jayce, alors que la discussion prend un tournant décisif autour de la taille de son marteau. ENCORE. Comme quoi il serait peut-être un petit peu démesuré. Comme toute chose en ce monde, hormis la science, voilà une question de point de vue. La maniabilité ? Ca se gère avec des contrepoids et la puissance de la gemme de Brackern. Le style ? Rien que le bon goût ne saurait régler. L'efficacité ? Multipliée par mille au moins, à n'en pas douter !

A l'aise avec son amie, porté par l'amusement du moment, l'inventeur se relâche avant que les choses ne deviennent trop sérieuses. Car elles le deviendront, c'est certain. En attendant, l'œil malicieux, le regard taquin, le sourire goguenard, il lâche en toute simplicité:

- Mais si la taille adéquate est la plus grosse, alors il ne faut pas avoir peur d'y aller à fond.

Fier de sa boutade ô combien immature, dos à son tableau, Jayce hésite un instant à garder ce ton léger pour aborder le mystère du symbole... mais il sent que ce serait aller trop loin. Il sent que ce n'est pas le moment. Caitlyn souffre, au moins autant que lui. On ne répond pas décemment à des angoisses par du rire et de la bonne humeur. Pas si on veut clore le sujet de manière définitive. Pas s'il veut conserver sa propre crédibilité, et la sympathie que lui porte son amie. Pensif, il porte alors à son menton une main à la fois habituée à la force du marteau et à la finesse du tournevis d'horloger.

- Hrm... j'ai eu envie de te faire mariner cinq minutes en réfléchissant, mais vu qu'en plus d'être la Shérif de cette ville tu es mon amie... non. Navré, je ne l'ai encore jamais vu.

S'il évacue dans les faits la question de cet étrange ornement, il se promet de l'étudier après. De le chercher, dans les rues, sur les anciennes pierres de Piltover. De le trouver, et de résoudre cette petite chose qui semble tant tenir à cœur à son amie. Si et seulement si réponse il y a.

En attendant, le voilà bien décidé à défendre bec et ongles son idée, son projet d'études autour de la Brume. Il ne lui sera pas difficile d'obtenir un financement de l'Académie: avoir le soutien d'une autorité piltovienne lui semble moins aisé malgré ses accointances, bien que tout aussi nécessaire à la réussite de son entreprise.

- Caitlyn, ma chère, voyons. Evidemment que je connais les risques. Je suis presque né pour ça ! Et bien sûr que je ne vais pas me pointer à la première taverne de Bilgewater, le mandat bien placardé sur le torse en hurlant des ordres à une bande de hors-la-loi testostéronés.

Avec un infini regret, il note mentalement de ne pas le faire, sauf si la situation l'exige/le permet. Rien ne vaut une entrée ou une sortie en fanfare, pour marquer les esprits. C'est depuis toujours son leitmotiv: briller, pour donner espoir. Ici, pour se faire remarquer un bon coup. Après, il faut bien commencer quelque part.

- Mais ton aval pourrait me permettre d'avoir une présence officielle, pour travailler avec les "autorités locales" en cas de besoin. Promis, promis, je ne conclurai pas de pacte mal senti entre ta belle police et ces brigands des mers.

Dans la mesure du possible.
Mais ça, Jayce n'a pas besoin de le préciser.
Caitlyn le sait. Parfois, il faut mettre les mains dans le cambouis.
Parfois, il faut se salir pour faire en sorte que d'autres n'aient pas à le faire.

Elle ne peut pas s’empêcher de plaisanter sur le marteau de Jayce, dans cette ambiance mutine et amicale, presque fraternelle, qui se tisse toujours quand ils sont tous les deux. Mais forcément, le plaisantin est toujours en avance d’un wagon sur elle, et cette fois elle sent ses joues prendre une teinte plus rose. Elle ne se choque pas facilement la shérif, - ou du moins c’est ce qu’elle aime a penser - mais elle doit reconnaitre qu’elle n’a pas vraiment de repartie digne de cette réplique. — Je vais supposer que tu t’y connais mieux que moi sur les tailles de …. Marteau et leurs convenances  pourtant, malgré tout, elle ne peut pas s’empêcher d’avoir un petit sourire. Jayce a ce chic pour rendre les situations plus légères, et pourtant il n’est pas n’importe qui. Au fond, c’est bien ce qui fait leur amitié. Ou peut être qu’il y’a quelque chose à dire sur le fait qu’elle aime s’entourer de grands et forts plaisantins qui devraient être serieux. Peut être.

La conversation redevient cependant - presque - serieuse, et elle sent ses épaules s’affaisser. — Dommage…  Un air un peu las, un peu epuisée aussi de toutes les recherches qu’elle a fait récement. Et pourtant, la lueur d’espoir est la, dans l’idée que Jayce lui pourrait aller à Bilgewater, un projet d’étude peut être, une bonne raison, elle arque un sourcil et elle secoue la tête à ce qu’il dit. —  Fais attention, tu seras un peu trop loin de ma juridiction pour que je vienne te recuperer et t’enlever les menottes. Et puis je pense qu’ils sont davantage planche et à l’eau plutot que menottes et prison la bas.  Elle l’imagine déja comme dans des livres racontant de vieilles histoires, provoquant la population locale de pirate et courant avec du goudron et des plumes sur son corps. L’image vaudrait le coup, les risques un peu moins.

Il a raison néanmoins, et elle le sait bien, ce qu’elle ne sait pas c’est si elle est capable d’envoyer son ami le plus proche à ce qui pourrait être une espèce d’abatoir. Ou plutot, elle ne sait pas si son coeur le lui permet, mais elle sait que la raison l’impose. —  Tu sais bien que je fais confiance à tes facultés de reflexion.  Son sourire se fait plus fin, plus discret, un peu plus lointain aussi, et ses yeux se plantent sur Jayce.  —Tu serais néanmoins notre meilleure solution, et ne prends pas cet air fier, nous savons tous les deux que tu vas avoir gain de cause.  

Passant la main dans les cheveux elle tente de ne pas imaginer le pire.  — Je vais travailler au mandat alors. Quand seras-tu capable de partir ?

- Evidemment que je vais avoir gain de cause, tu ne peux pas me résister.

Oh, tous les deux ont bien sûr eu leurs différents, par le passé. Leur vision des choses ne parvient pas toujours à s'accorder, et les actions de Jayce le conduisent souvent à opérer en parallèle de la loi, tout ce qu'est sensée représenter Caitlyn. Que ce soit concernant Zaun, l'ethos académique ou les risques de corruption des subordonnés de la Sheriff, il leur est souvent arrivé de se disputer, même plusieurs semaines durant. Mais à la fin, lorsqu'ils se retrouvent pour mettre à plat leurs griefs, un petit regard tout triste de chien battu suffit à briser la glace. Comme celui qu'il offre là, certes de manière plus comique que d'ordinaire.

Victorieux dans sa démarche, il n'oublie pour autant pas d'écouter les recommandations de Cait. Bilgewater n'est clairement pas réputé pour être une société ordonnée, et il serait dommage pour lui de se faire avoir par quelque vaurien, pris dans un obscur règlement de comptes ou condamné, comme évoqué, à la fameuse planche au dessus des requins. Une idée qui lui tire un sourire, tant cela paraît saugrenu.

- Sans doute faudra-t-il que je révise un peu mon dos crawlé, alors.

Vient ensuite la question d'ordre pratique la plus importante de toutes en cela qu'elle les concerne tous les deux: les délais avant envol.

- Il me reste quelques travaux d'importance à régler, et un conseil d'attribution des projets dans six jours. Fixons donc un départ dans neuf jours. Ca te laissera le temps de rédiger le papier ?

Après les formalités administratives de l'Académie, hautement rébarbatives s'il en est, trois jours ne seront pas de trop pour faire un choix dans l'immensité d'outils scientifiques, de gadgets farfelus et d'instruments de mesure à sa disposition. Bien trop lui viennent déjà en tête, comme ce petit baromètre électromagnétique tout mignon, ou cette clef à molette pliable de marque Talis, ou encore cet énorme pôle topographique récemment fourni aux gestionnaires des expéditions scientifiques par une des sommités en la matière.

Mais l'inquiétude de Caitlyn le tire de ces réflexions sommes toutes matérielles. Avec plus de calme, et une main douce posée sur son épaule, il soupire un bref instant avant de tenter une nouvelle fois l'une des choses les plus ardues en ce bas monde: chasser les angoisses de son amie.

- Hé, Cait. Ca va aller. Vraiment. Il ne m'arrivera rien là-bas. Contrairement à ces pirates d'opérette s'ils essaient de m'attacher à un de leurs mats.

— Je pourrais presque dire que tu es fatiguant. Et pourtant elle le dit avec un leger sourire. Parce que Jayce est Jayce et que personne d’autre n’arrive à la faire sourire de cette sorte malgré la situation difficile. Et bien sur Vi le peut mais c’est autre chose, elle l’exaspere aussi souvent que lui cela dit, et il y’a quelque chose à rechercher de manière analytique sur le fait qu’elle s’entoure de personnes qui lui fassent lever les yeux au ciel ? Peut être. Ce n’est pas le sujet cela dit, et finalement elle reste silencieuse le temps que Jayce redevienne serieux. Parce qu’il y’a quand même plus ou moins l’avenir de Piltover en jeu, parce qu’il y’a quand même peut être même le sort du monde en jeu, et elle ne peut pas perdre de temps. Personne ne le peut. Alors oui, peut être qu’elle est trop inquiete, peut être qu’au fond, elle pourrait se detendre un peu, parce qu’elle est en présence d’un ami.

Elle essaye un peu alors qu’il est question de sujet pratique, et aprés avoir hoché la tête elle se fend de ce qui pourrait ressembler a une legere plaisanterie. Ou du moins elle espere qu’il s’agit de ça, et qu’elle y arrive bien. — Oui et ça te laissera le temps de changer un peu ta garde robe, je ne suis pas sure que tes vetements guindés et trop lumineux soient adaptés à un tel lieu.  Bien sur, elle ne pretend pas à ce qu’ils le transforment en pirate, mais peut être qu’une nouvelle garde robe lui fera du bien. Elle fronce néanmoins les sourcils l’air un peu concerné. — A moins que tu ne prévoie d’y aller en les séduisant torse nu ?  Une reference a un moment où elle l’avait appercu en train de heurter le fer dans son atelier le moins vétu possible. Un grand moment de gene que ça avait été pour elle d’ailleurs, elle en avait eu les joues rouges toute la journée.

Mais la situation ne reste malheureusement pas assez peu serieuse, et la main de Jayce sur son épaule la fait simplement soupirer un peu plus fort, alors qu’elle se tourne vers lui, et pose sa main sur la sienne. — Je sais bien de quoi tu es capable, ce n’est pas ce qui me fait peur… Enfin, peut être un peu tout de même, je ne voudrais pas envoyer mon ami à la mort. Mais je sais que c’est nécessaire que tu ailles la bas, promet moi juste d’être prudent quand même ? Et pas… trop exubérant.  C’était dit au moins, et maintenant elle se redressait un peu, laissant le masque de la Shérif guindée et droite dans ses bottes revenir sur son visage, laissant les inquiétudes de coté. — Je devrais peut être te laisser retourner a ton projet de …. Véhicule volant ? Une façon comme une autre de savoir si elle devait le laisser ?

S'il y a bien un adjectif pour désigner Jayce Talis, c'est effectivement fatigant. Il court toujours partout, plein de fougue et d'idées, sans même penser un instant à ralentir le rythme pour que les autres puissent le suivre. Ce n'est pas par mépris, loin de là. Simplement, plus vite il atteindra ses objectifs, plus vite les pauvres gens de Piltover, Zaun et d'ailleurs pourront se reposer sur le confort garanti par ses inventions. Cela dit, dans la bouche de Caitlyn, il est prononcé avec une affection véritable, rarement trouvée ailleurs, même auprès des bons citoyens de la cité. Alors plutôt que de mal le prendre, il pouffe tout simplement, et passe à la question de sa tenue une fois arrivé à Bilgewater.

- Quoi, tu préfères un tricorne, un cache-oeil et une jambe de bois ?

Au début, Jayce ne semble pas répondre à la petite pique de son amie. Après tout, peut-être qu'il n'a pas vu Caitlyn lorsqu'elle l'a surpris en train de faire chauffer sa forge, l'autre jour. Peut-être qu'il était trop occupé... peut-être... ou peut-être pas.

- J'ai ouï dire que le poil sur torse nu était la tendance de l'été à Bilgewater. Alors pourquoi pas ? Dommage, cela dit: tu ne pourras pas voir ça, cette fois.

Car si, par la moustache touffue d'Heimerdinger, il l'a vue.
Et c'est sans honte qu'il le lui signifie bien, un sourire gourmand aux lèvres.
Un sourire qui continue même de s'agrandir, alors qu'il se moque encore un peu d'elle.
Cela couve peut-être un brin de crispation, celle d'être un peu trop materné par son amie. Elle a beau être Shérif, Caitlyn n'est pas sa mère. Et il n'a pas dix ans, par le Progrès ! S'il est considéré comme le protecteur de Piltover au même titre que les forces de l'ordre, ce n'est pas parce qu'il a passé les cinq dernières années à broder des napperons.

- Caitlyn. Prudent, c'est mon quatrième prénom. Après Jayce, Tête-Brûlée et Trop-Curieux. Il n'y a donc AUCUNE raison que les choses tournent mal. Je vais simplement soudoyer un pirate pour qu'il me serve de guide, tomber dans une embuscade, triompher de la dite embuscade, récupérer mon argent, trouver un autre pirate, et ainsi de suite jusqu'au bon. Rien de bien terrible, tu sais. Un mardi, en somme.

Il soupire, et admet tout de même:

- Le gros du morceau, ce sera d'étudier la Brume.

Bien qu'encore un peu hérissé, Jayce secoue la tête quand la Shérif propose de le laisser tranquille.
Caitlyn a beau être parfois du genre étouffant, il est impossible de lui en tenir rigueur plus d'une minute ou deux. Et puis cela fait trop longtemps que son cerveau macère dans ce laboratoire surchargé. Autant s'ahérer. Et casser du vilain s'il y en a sur la route.

- Hmmmmm non. Je n'arrive à rien, là. Il me faudrait plus d'idées neuves, et surtout un bon bol d'air. Alors si ça ne te dérange pas ma vieille, je vais t'accompagner un peu dehors. Broyer du noir, ça n'est bon que perché seul sur un toit, avec une pluie battante au-dessus de soi, et des éclairs dans le lointain.

Alors il se dirige vers la sortie du complexe de recherches en compagnie de son amie, les mains soigneusement croisées dans le dos comme tout érudit qui se respecte... ou comme toute personne âgée avec le dos fourbu aussi, mais chuuuut, ça, il ne faut pas lui dire.

— Te connaissant, la jambe de bois deviendrait une jambe hextech, et il deviendrait vite compliqué d’expliquer tout ça aux aux pirates mal famés. Non décidément, ça ne me semble pas le plus idéal non plus. Ses lèvres restaient dans cette position heureuse, et elle l’était. La compagnie de Jayce, leur agréable façon de se chambrer, c’était quelque chose qu’elle n’échangerait pour rien au monde. Quoi que… A la reflexion a propos de son torse nu, finalement elle aurait bien volontiers cherché à se cacher dans le premier trou à rat venu. Pas de chance, il n’y’en avait pas, et elle se contenta de secouer la tête. — Oh tu sais, ça ne me manquera pas vraiment. Je laisse ça a tes groupies en délire. Parce qu’il en avait, elle le savait. Son meilleur ami avait toujours eu un succés fou avec les femmes, et quelques fois sa propre mère avait fait des suggestions que Caitlyn avait immédiatement etouffées dans l’oeuf.

Mais elle était contrariée Caitlyn, et finalement elle allait peut être un peu loin. C’était simple, elle comprenait la necessité d’envoyer Jayce à Bilgewater, mais elle ne pouvait pas s’empehcer de s’inquieter. Comment ne pas le faire en réalité ? Elle ne voulait juste pas le perdre. Pourtant, il continuait de prendre les choses à la legère, et une fois n’était pas coutume, elle baissa les bras. — Je sais, je sais. T’es totalement apte à te sortir de toutes les situations. Je te fais confiance sur ça. est ce qu’elle était renfrognée ? Un peu. Est ce que c’était la raison pour la quelle elle voulait partir ? Oui. Probablement.

Pourtant une fois de plus Jayce venait de la désamorcer et finalement elle cessa de penser à s’enfuir, se tournant au contraire vers son ami qui se dirigeait vers elle, et vers la sortie. Quand il marchait, il ressemblait à des vieux philosophes et cette pensée la fit sourire, car si Jayce était un intellectuel, il était loin d’être le plus sage. Elle se retint de tout commentaire pour le moment. — Tu me vois ravie de t’empecher de sombrer dans le cliché du penseur nostalgique. Et puis je ne voudrais pas t’arrêter pour avoir gravi sur des toits qui ne t’appartiennent pas. Certains habitants de la cité du progrés n’aimaient pas que l’on pietine leurs affaires, et n’étaient pas trés partageurs. Elle secoua un peu la tête. 

— Qui sait, peut être qu’en marchant tu auras de nouvelles idées pour ta voiture volante. Tant que tu ne songes pas à creer des robots capable de remplacer les forces de l’ordre. Bien que je ne serais pas contre quelques vacances. Contrairement à ce que tout le monde pouvait penser.

Un rien peut emballer l'imagination fertile d'un scientifique, mener son esprit sur les chemins d'une nouvelle découverte. Observer une pomme chuter, remarquer la diffraction de la lumière dans sa chambre, être témoin de la magie du monde, prendre un peu trop au sérieux une petite phrase voulue taquine. Il est vrai que la prothèse de bois hypertechnologique n'a rien de révolutionnaire... mais c'est toujours très drôle à conceptualiser. Surtout pour quelqu'un avec autant de capacités et de moyens que Jayce Talis.

- Même si la jambe hextech peut tirer des boulets de canon ? Ce serait thématique, au moins.

A ça, il ne rajoute rien, alors que son amie se rembrunit puis s'éclaircit à nouveau, un yoyo bien trop fréquent lorsque tous deux viennent à discuter. La désinvolture d'un côté et la surprotection de l'autre ne font pas bon ménage, et pourraient les éloigner si la force de leur amitié n'était pas à toute épreuve. Ensemble, ils ont traversé de lourdes épreuves, ils ont survécu là où beaucoup sont tombés, pour en ressortir plus fort, plus proches que jamais.

Ce qui n'empêche évidemment pas les fréquentes prises de bec mais que voulez-vous ? On ne se refait pas. On ne se refait d'ailleurs tellement pas qu'après la jambe de bois boostée à l'Hextech, c'est une idée de robocops que lui souffle Caitlyn, toujours toute en plaisanteries inspiratrices. Une vraie muse sans le vouloir.

Des drones capables d'épauler les forces de l'ordre seraient un réel avantage dans la lutte contre ceux d'en haut qui veulent détruire l'en-bas, et ceux d'en bas qui veulent détruire l'en-haut. Mais cela demanderait tellement de travail pour simplement en calibrer un... que Jayce préfère garder ça dans le fond de sa tête pour rebondir avec toute la légèreté qui le caractérise.

- Oh, des pacifibots, ce serait une idée ça... par contre... j'ai bien entendu le mot "vacances" passer entre tes lèvres, là ? Mais c'est que tu te fais vieille pour parler de choses comme ça, ma parole !

Il pose la main sur la poignée de porte du laboratoire, prêt à l'ouvrir.

- Allez, montre moi encore à quel point la Shérif de Piltover est encore jeune et fraîche lorsque vient le moment de plonger dans l'action !

Il tire ensuite le battant avec un geste d'une large amplitude et fait entrer d'un coup la lumière du jour à l'intérieur. C'est doux, c'est chaud, c'est bon et la vue est superbe. Sans aucun doute possible, Piltover est bien la plus merveilleuse des cités du monde.

D'un petit mouvement de tête, il invite Caitlyn à sortir, pour la suivre immédiatement après. Clic clac clic, verrous refermés, porte scellée, protection maximale des outils et recherches Ferros. Mais une fois dehors, pas de super-vilain à terrasser, pas de course-poursuite effrénée, même pas un voleur d'orange en vue. Juste une bonne vieille patrouille à l'ancienne. Jayce grimace.

- Ou dans la routine quotidienne des gardiens de l'ordre. Ca marche aussi, je suppose.

Pour autant, il ne revient pas sur sa décision, et commence à accompagner son amie dans les rues pavées de la capitale mondiale de la science. Dans chaque allée on ne manque pas de les saluer: Jayce & Caitlyn, c'est un peu un duo iconique dans cette ville, l'alliance parfaite entre la poigne inaltérable des agents de l'ordre et l'engouement absolu du progrès. Une force avec laquelle les honnêtes gens peuvent se sentir en sécurité.

Après avoir passé quelques rues, un air de plus en plus soucieux sur le visage, le scientifique semble hésiter à parler, à dire quelque chose. Des mots peinent à franchir le seuil de ses lèvres, pas sans un petit coup de pouce en tous cas.

— Oh tu me déçois tu pourrais au moins rajouter un moyen de te propulser dans les airs et de t’envoler, avec des flammes, ou peut être des feux d’artifices pour que l’on ne voit que toi. La conversation changeait sans mal entre les deux, passant de l’inquietude, à l’amusement, pour revenir à l’inquietude. C’était ainsi qu’etait faite leur relation oui. Et ça plaisait à Caitlyn cette familiarité, c’était agréable vraiment, c’était quelque chose dont elle ne pensait pas pouvoir se passer un jour. Une des raisons probablement pour les quelles elle ne voulait pas qu’il arrive de malheur à Jayce, une des raisons pour les quelles elle s’inquietait énormément pour lui, et pas parce qu’il était le protecteur de Piltover non.

Enfin, la conversation avait avancée, et elle ne pu cacher le moment où elle gonfla les joues, presque outrée par ce qu’il venait de dire. Avant de rire un peu. C’était leger toujours, mais c’était la, et c’était l’essentiel. — Tu m’as bien entendu oui. Qui sait, peut être que j’ai envie de partir visiter les bords de mer et leurs mystères moi aussi, rencontrer des pirates sans gène, des monstres marins tentaculaires, ou faire du tourisme dans des empires belliqueux ? Une plaisanterie bien entendu, car malgré tout ce qu’il pouvait se passer et ce qu’elle pouvait dire, Caitlyn était attachée à Piltover, et les deux étaient nécessaires l’un à l’autre, la ville et sa gardienne.

Ville magnifique d’ailleurs qui s’offrait à eux maintenant. Secouant un peu la tête, la pacifieuse arrangea son uniforme, et sa posture, les épaules droites, le visage concerné. — Alors allons patrouiller tous les deux. Ca faisait longtemps qu’ils n’avaient pas fait ça, et Caitlyn appréciait la compagnie. Les patrouilles solitaires pouvaient être lassantes. Une chance que Jayce ait toujours le chic pour ameliorer les choses, les rendre plus… agréables. — Je crains qu’il ne s’agisse aujourd’hui que de routine. Il n’y’a guère d’action pour faire bouger Piltover en ce moment. Si ce n’était la menace que Demacia avait subit avec la brume noire. Mais ça, c’était autre chose.

Saluant quelques passants, quelques marchands aussi, Caitlyn profitait de ce moment, où elle se sentait plus que jamais protectrice de la ville. Néanmoins quelque chose semblait perturber Jayce, et elle s’arreta alors qu’ils marchaient sur un pont, le regardant droit dans les yeux. — Je te connais trop, alors crache le morceau. Qu’est ce qui ne va pas ? Le vent battant dans ses cheveux la fit grimacer, la rendant terriblement humaine sur le moment. Et inquiete.

- Ce qui ne va pas ?

Qu'est-ce qui ne va pas, Jayce ? A part cette menace brumeuse venue de tous les côtés, Noxus qui s'agite depuis bien trop longtemps aux portes de Piltover, les monstres de plus en plus nombreux dans les ombres du monde, la magie incontrôlable de pauvres fuyards démaciens et les chembarons qui s'acharnent à briser ce qu'ils ne peuvent posséder ? Eh bien, il y a encore autre chose, oui, que les lumières de Caitlyn pourraient éclairer au moins un petit peu.

Prenant une profonde inspiration, signe que la chose lui tient à coeur, Talis se lance dans un discours qui s'enflamme un peu plus à chaque mot, qui gagne en force au point de surprendre les citoyens de la haute-ville autour d'eux, pourtant habitués aux exultations et déprimes des scientifiques de la Cour du Vent Bleu.

- Depuis qu'on est tout jeune, toi et moi, on a été soumis à des autorités. Mes mécènes, et tes supérieurs hiérarchiques. Tu as réussi à t'en libérer, comme la super-flic que j'ai toujours vu en toi, mais moi... des chaînes m'empêchent d'être libre de travailler pour l'amélioration du monde.

Certains pourraient arguer que le strict respect des lois, ou les comptes à rendre au Conseil retiennent encore la Shérif, mais une relation de confiance s'est instaurée avec les dirigeants de Piltover, ces dernières années, assez pour laisser à la Kiramman les coudées franches. Ce qui n'est pas le cas de Jayce, à ses yeux en tous cas.

- La famille Ferros sont de généreux bienfaiteurs, mais leur vision des choses ne me convient pas. L'argent, le monopole et le pouvoir ne m'intéressent pas. Pas comme fin en soi. Pas pour rendre Piltover, Zaun et le reste de Runeterra meilleur.

Un silence s'installe un instant, chargé de trac et de tension.

L'inventeur hésite. Son esprit se brouille, sa bouche s'assèche, une pierre imaginaire tombe dans son estomac, un peu plus lourde chaque seconde qui passe. Mais au diable la peur, au diable l'angoisse: l'avis de Caitlyn lui importe trop pour attendre, trop pour ne pas l'entendre. Alors il se lance, enfin, un peu sec mais direct, au moins.

- Cait, je veux fonder ma propre entreprise. Est-ce que tu penses que c'est une bonne idée ?

Être la avec Jayce lui rappelait tellement de moments de son enfance, quand ils étaient plus jeunes et affranchis des limites de ce monde, quand ils étaient encore insouciants, heureux. Pas que Piltover n’ait jamais été un paradis non, mais c’était différent de se dire qu’enfants ils ne pensaient pas au monde qui les entourait, ils étaient juste heureux. Ils ne l’étaient plus. Ils n’étaient plus enfants depuis longtemps et de nombreux événements s’étaient produits désormais les empêchant de le rester. Ils n’étaient plus enfants non, et l’un et l’autre avaient des cauchemars, des chimères, des doutes et des troubles qui leur faisaient mal peut être. Elle même n’était pas à l’abri de certaines pensées qui la perturbaient. La brume menacante, les menaces de Noxus toujours, les chembarons aussi, leurs pensaient se rejoignaient sur ça. Et puis il y’avait Vi, mais la cogneuse était un autre sujet dont elle ne voulait pas parler avec Jayce. Peut être par peur qu’il n’ait raison sur certains points.

Le moment était à l’écoute de son ami, son frère, dont les mots la touchaient plus que de raison. Et elle allait répondre oui, mais avant tout, elle le laissait finir, le laissant continuer tout en le regardant avec ses grands yeux expressifs et chargés de compréhension.  

Je veux fonder ma propre entreprise. Elle ne s’y était pas attendu bien sur. Et pourtant ça ne le surprenait pas. Elle ne doutait pas que ça viendrait un jour, que Jayce était bien trop libre dans sa tête pour continuer a travailler les Ferros. Il était passé au fil du temps de mecenat en mecenat, et les Ferros lui avaient fourni tout ce qu’il désirait, mais les Ferros étaient… — La famille Ferros a une vision particulière du monde.  Elle n’était pas spécialement d’accord avec la façon dont ils voyaient le reste du monde comme une source de revenue, mais elle ne pouvait pas non plus parler ouvertement contre l’une des plus grandes familles de Piltover. Même si elle était une Kiramman.  —Une vision qui ne colle pas vraiment avec la tienne, ce que je peux comprendre.  Elle essayait pourtant de parler sans langue de bois, et finalement elle offrit à Jayce un sourire.

— Si tu veux mon avis, et tu ne m’en aurais pas parlé si ce n’était pas le cas Ses mots furent suivi d’un petit sourire amusé, un rien mutin. Quelqu’un d’aussi talentueux et volontaire que toi ne devrait pas avoir peur de foncer et de fonder une entreprise, une nouvelle dynastie. Le progrès pour le quel tu travaille Jayce est des plus importants pour rendre Piltover et le monde meilleurs. Machinalement sa main vint se poser sur l’avant bras de son ami. Mais tu le sais tu auras besoin de soutien auprés du conseil. Et certains pourraient tenter de te mettre des batons dans les rouages. Les Ferros eux meme peut être ? Mais d’autres inventeurs tout aussi mal avisés. Une chose était sure, il aurait le soutien des Kiramman, et de Caitlyn elle même.