Le plus grand monde

La douleur était envahissante. Des chocs électriques parcouraient sa peau et créait des soubresauts dans ses muscles. Sa respiration était erratique, la sueur perlait sur son front. Tout ce qu'elle voyait autour d'elle était la noirceur et une brume teintée de mort, vert, turquoise. Des voix inaudibles, incompréhensible retentissaient autour et dans sa tête. Puis une lumière fulgurante tandis que son coeur se glaçait sous les murmures incessants et Tamryn ouvrit les yeux au Placidium.

D'abord un éclat turquoise dans ses pupilles sombres, il disparait rapidement alors qu'elle reprend conscience, les derniers évènements dans son esprit se rejouant très rapidement. Un coup d'oeil paniqué autour d'elle et la guerrière peut observer les dégâts de l'attaque des morts. Des blessés à perte de vue, elle avait évidemment été amené avec eux puisqu'elle avait visiblement perdu connaissance à la fin de tout ça. Il devait avoir gagné comme le voile de brume semblait s'être retiré de la cité, mais à quel prix?

Tamryn se redressa péniblement pour regarder autour. À son côté se trouvait son épée, une amie fiable au plus profond de son désespoir, des pires aux meilleurs moments. Elle soupira tandis que son corps fatigué protestait sous l'effort qu'elle lui imposait. Il y avait des gens en pire posture qu'elle et les aides médicales semblaient débordées. Elle ramassa le peu de chose qui lui appartenait et qui se trouvait à porter avant de se lever. Personne ne sembla le remarquer tandis qu'elle trainait des pieds jusqu'à la sortie de... l'hôpital de fortune? Probablement.

L'épéiste se traina difficilement à l'extérieur où le soleil l'éblouit, plissant les yeux, regardant avec difficulté à travers la journée lumineuse, elle avança vers le dernier endroit où elle se souvenait s'être tenu devant l'esprit corrompu. L'eau circulait librement d'une clarté et transparence pure. Ils avaient vraiment vaincu la corruption qui avait tenté de s'emparer de l'un des esprits des terres premières. Tamryn se serait presque effondré de nouveau, si ce n'était de sa fierté.

Prenant une grande inspiration qu'elle relâcha en douceur, elle remercia tous les esprits et la terre de cette bénédiction quand ses yeux tombèrent sur une silhouette familière et étrangère à la fois. Un vague souvenir de sa voix qui la tirait hors des ténèbres lui revint, et le souvenir un peu plus clair de leur première rencontre. Si sa fierté la faisait tenir debout alors qu'un autre se serait effondré, il lui disait également d'ignorer la femme et repartir, elle en lui devait rien, mais son honneur la poussa vers elle. Et peut-être quelque chose d'autre qu'elle ne savait pas comment identifier.

"Je vous dois des excuses. Et je vous suis redevable plus que tout." dit-elle en s'arrêtant près de la conteuse. Tamryn se souvenait très bien de leur première rencontre qui, malgré elle, avait plus ou moins bien tourné. Bien qu'elle été curieuse de la femme, Kol-Semperaüm l'avait tout de suite détesté et les émotions de l'esprit avait influencé les siennes, mais la guerrière pouvait sentir son esprit-gardien se reposer et donc elle était à l'abri de ses contrariétés pour le moment.

Son corps était lourd tandis qu'elle faisait face à l'étrangère, mais la guerrière savait qu'elle s'était assez reposé, du moins pour le moment. Les esprits étaient bons, ils lui offraient la possibilité de faire la paix avec une femme qu'elle n'avait pas respecté et qui pourtant, s'était montré bonne pour les terres premières au final. Tamryn avait parlé et le silence avait suivi ses paroles, lui laissant une certaine tension. Elle ne pourrait qu'Accepter l'ire de la femme si cette dernière lui répondait d'une telle façon. Elle avait lancé les hostilités et bien que son appréhension et sa méfiance des étrangers ne soit guère abattu, cette femme s'était montré digne de surmonter ses convictions premières envers les gens d'ailleurs.


Puis finalement l'acceptation vint et Tamryn ne put s'empêcher de relâcher un souffle qu'elle ne s'était pas aperçu retenir. La tension accumulé dans ses poumons et ses épaules s'évaporant comme la brume qui s'élevait paresseuse de la rivière, une brume, heureusement, parfaitement ordinaire. Le regard de la guerrière observa l'autre femme et son sourire et quelque chose la tirailla en dedans, une sensation étrange et inconnu, mais elle l'ignora, décidant de l'analyser plus tard. Pour l'instant, des runes de lumière flottent dans les airs et la femme jonglent avec celles-ci du bout des doigts avant de les faire disparâitre et c'est un peu intriguant. L'épéiste a déjà vu plusieurs types de magie dans sa vie, mais jamais une comme celle-là. Puis la femme posa une question et remarqua sur son état. Avait-elle l'air en si mauvais état?

"Beaucoup ont plus besoin que moi." Et puis, elle avait déjà vécu pire et survécu avec moins de soins. Il ne lui restait essentiellement que la fatigue et l'abattement de son corps. elle ne ressentait aucune blessure et n'en avait vu aucune. Elle continuait à observer le visage de la femme, ses yeux de glaces, ses cheveux d'obsidienne avant de finalement détourner son regard. "Je vous suis redevable. Vous m'avez sauvé."

Ses phrases étaient courtes. Étrangement, elle voulait dire plus, mais se retrouvait à court de mots face l'autre femme. Pas que c'était inhabituel.

Tamryn savait que 'mériter des soins' n'étaient pas une compétition, mais elle comprenait aussi que dans ce type de situation, avec des dégâts d'aussi grande envergure, il n'y avait jamais assez de soigneurs et toujours trop de victimes. Elle n'ajouterait pas au fardeau de ces derniers quand simplement quelques jours de repos pouvaient suffir pour récupérer. La guerrière ne fit que pencher la tête silencieusement d'un côté avec un petit sourire qui lui tiraillait un coin de la lèvre. Ce n'était pas la première fois qu'on lui disait de telles choses, elle pouvait être têtue quand cela venait à sa santé et ses besoins. Elle n'avait jamais été une très bonne patiente.

Un signe de main plus tard, une invitation et malgré elle, l'épéiste s'avança vers l'étrangère, une étrange curiosité la saisissant. Maintenant que Kol dormait aussi dans son royaume, Tamryn était libre de vivre ses émotions sans intervention et elle ne se sentait plus du tout comme lors de leur première rencontre. C'était... nouveau et étrange. Elle avait une sorte de fascination pour l'autre femme qu'elle ne pouvait pas s'expliquer, mais la... magicienne? Oui probablement vu les runes qui avaient flotter dans les airs avant de disparaître dans sa main. La magicienne la fascinait d'une certaine façon, mais elle ne pouvait s'expliquer de laquelle.

Le guerrière prend place aux côtés de la magicienne tandis que celle-ci parlait avec des paroles... qui n'engageaient parfaitement rien. C'était un peu coquace.

"Vous n'êtes pas un danger pour nos terres, c'est vrai." L'humour n'était pas un point fort de Tamryn, loin de là. Cela lui passait toujours bien au-dessus de sa tête et on devait généralement lui expliquer les blagues. De même, la moquerie taquine faisait un peu de même, mais pas complètement. "Par contre, à vrai dire... j'ignore toujours votre nom." C'était donc toujours une étrangère, du moins pour Tamrynet si le visage de la guerrière n'exprimaient pas beaucoup d'émotion, ses yeux se voulaient rieurs.

Puis la magicienne revint sur le combat et toute trace d'humour quittèrent son visage et son regard se porta sur le fleuve, où l'esprit devait toujours demeurer, libéré de la corruption. "Ionia a déjà trop souffert à la main de gens," étrangers, d'ailleurs n'étaient peut-être pas les mots à utiliser en ce moment, "ignorants de ses traditions et de sa nature. Cette... chose qui s'est emparé de l'esprit, on ne pouvait pas continuer à la laisser corrompre ce qui reste de bon et intact. Ma vie n'aurait été que petit prix pour sauver les gens et les terres." Et la guerrière le pensait vraiment. Elle se souvenait de la corruption, des voix susurrant à son oreille, la tentant, le mal froid et paralysant qui lui avait parcouru les veines. Un frisson presque imperceptible lui parcouru la peau, soulevant le poil de ses bras et sur son échine.

"Vous avez aussi aider." Un pause. "Vous m'avez aidé. Votre voix m'a tiré des ténèbres."